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Critique de JBLM


Un livre assez hétérogène, tantôt limpide, tantôt abrupt, tantôt analytique, tantôt descriptif. Il consiste en une compilation plus ou moins ordonnée d'écrits, soit spontanés, soit sollicités (préfaces, articles) de l'auteur mêlant intrinsèquement politique et philosophie dans son appréciation des forces à l'oeuvre en Occident, et plus particulièrement en France, en cette veille de Seconde Guerre mondiale.

L'auteur se montre plus ou moins visionnaire selon les chapitres. S'il est en effet assez troublant de le voir redouter dès cette époque l'équivalent de la fameuse et non moins fâcheuse « cancel culture », on lit avec une certaine ironie l'espoir de voir la jeune nation américaine devenir le sanctuaire de la culture européenne, abandonnée peu à peu par son espace d'épanouissement historique. Les textes sont travaillés par cette aspiration profonde de caractériser concrètement, au-delà de l'emphase patriotique, les concepts qui fondent notre identité : la nation, la France, l'Europe, etc… Ils témoignent d'un doute existentiel qui, contrairement à ce que l'on croit, n'est pas une angoisse récente liée à la mondialisation mais une blessure gravissime reçue par notre civilisation durant la Grande Guerre, qui n'est pas encore guérie et ne le sera peut-être jamais si elle continue à être mal traitée. Valéry, parmi d'autres, contribue très tôt à cette tentative de convalescence en tâchant d'exprimer ce qui fait à la fois notre unité d'Européens et notre spécificité de Français, dans un contexte pour le moins tendu puisque les sous-entendus de beaucoup de textes, lourds d'ambiguïté inquiète, prennent avec leur datation finale, frôlant par endroits l'année 1939, un caractère prémonitoire. le chapitre « Images de la France », assez court, m'a particulièrement marqué : il défend l'idée d'un caractère proprement français largement déterminé par les caractéristiques géographiques de notre territoire.

Les thématiques sont assez diverses, les chapitres se classent globalement entre les dominantes géopolitiques (Europe, Chine, Amérique), culturelles (littérature, art, langue) et politiques (esprit des lois, des partis). Tout n'est pas passionnant, loin de là, quoique l'écriture impeccable et précise de l'auteur, même s'il peut arriver qu'il s'aventure dans le jargon philosophique pénible, en atténue heureusement l'effet, en mobilisant par exemple des images poétiques, justes mais étonnantes dans ce contexte, et en faisant appel à l'imagination du lecteur. Cela étant, l'auteur rechigne un peu à proposer des exemples concrets et développés, puisés dans l'histoire ou dans la littérature, de ce qu'il avance, ce qui complexifie la compréhension des idées et laisse souvent le propos dans une abstraction peu praticable. Un long chapitre est consacré à l'importance de la notion d'« esprit », qui laisse perplexe à bien des égards ; les derniers chapitres rendent compte d'expositions ou de projets de centres universitaires dont l'intérêt est désormais extrêmement relatif. Plutôt qu'à une lecture « normale », c'est-à-dire chronologique et exhaustive, c'est donc plutôt à une lecture thématique, aiguillée par des titres de textes assez explicites sur leur contenu, que l'oeuvre semble se prêter.
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