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Critique de JustAWord


Les projets de science-fiction dans le monde de la bande-dessinée se multiplient. Ce qui n'est pas pour nous déplaire.
Glénat BD nous offre cette fois la traduction de Little Bird, premier projet du réalisateur et auteur canadien Darcy van Poelgeest chez l'éditeur indépendant Image Comics.
Au dessin, on retrouve le génial Ian Bertram (Dans l'antre de la pénitence) épaulé par les couleurs de Matt Hollingsworth (Preacher, The Wake).
Une équipe de choc donc qui mise sur un sous-genre particulièrement en vogue : la dystopie post-apocalyptique.

Dans un futur indéterminé, l'Empire Américain est devenu une dictature fasciste, agressive et théocratique. Depuis trente ans, la guerre fait rage sur le continent Nord-Américain et seule une poignée de rebelles se dressent encore contre le Nouveau Vatican et son Évêque Tout-Puissant.
Parmi eux, une jeune fille du nom de Tantoo, surnommée Petit Oiseau, et sa mère. Lorsque cette dernière s'apprête à affronter l'envahisseur dans un ultime affrontement, Petit Oiseau comprend que ce sera bientôt à elle de lutter envers et contre tous.
Bien décidée à renverser l'Évêque et ses sbires, elle fait chemin vers le Nord, pour retrouver le dernier héros canadien : La Hache. Pour libérer le peuple, le Nord, et perpétuer le Rêve.
C'est dans un récit abrupt que nous entraîne Darcy van Poelgeest avec Little Bird. le monde tel que nous le connaissons n'existe plus, il a changé, évolué. Des mutations ont entraînés l'apparition de nouvelles espèces (qui ne sont jamais le coeur du récit) et certains hommes sont venus au monde avec un gêne très particulier qui les rend quasiment indestructibles : le gêne de la résurrection.
Rejetée par l'Église, ou plutôt par l'horrible système totalitaire et ultra-violent qu'elle est devenue, cette évolution fait l'objet d'une traque impitoyable. Une traque d'autant plus sanglante qu'elle coïncide avec l'hégémonie de l'Empire Américain sur le reste du monde et notamment sur la résistance canadienne, dernière encore en lutte.
L'histoire débute pourtant avec la quasi-annihilation de celle-ci et le début d'une aventure pleine de rage et de vengeance, celle de Petit Oiseau.

À première vue, ce futur n'a rien de vraiment original. À première vue seulement.
Car le trait de Ian Bertram et l'univers coincé quelque part entre les délires d'un Jodorowsky et la patte graphique d'un Moebius transforme ce qui n'aurait pu être qu'une énième balade en terrain post-apocalyptique en une histoire poignante, violente et passionnante.
Grâce au récit de Darcy van Poelgeest d'abord, qui prend des détours inattendus et pousse la violence et l'univers catho-totalitaire à son paroxysme servi par un délire science-fictif aussi réjouissant que glaçant.
Par les personnages ensuite, et cette histoire proto-familiale entre Petit Oiseau, Gabriel et l'Évêque. Une histoire de vengeance, de colère et d'amertume où le monde vacille sur ses bases à cause de l'intolérance et de la folie des hommes.
L'approche cryptique de l'univers et de sa chronologie laisse au lecteur une envie irrépressible de tourner les pages pour démêler le vrai du faux, pour grappiller de nouvelles informations sur ce futur où la technologie permet des miracles mais où l'homme semble toujours aussi gangrené par la foi.

Violent, le comic l'est totalement. Ian Bertram et Matt Hollingsworth accomplissent un travail particulièrement fascinant et offre au lecteur des planches généreuses en matière d'hémoglobine et de membres tranchés.
Little Bird parle de toute façon d'un monde mort et qui n'en finit pas de mourir à cause de la monstrueuse bêtise humaine, du fanatisme et de la rancoeur. Au milieu, Petit Oiseau rassemble tout : la colère, le chagrin, le courage et l'espoir. Perdue dans un univers où le compromis n'est plus possible, elle choisira de faire tout ce qu'il faut, même le pire.
Derrière ses allures de divertissement ultra-violent, l'oeuvre de Darcy van Poelgeest fourmille de réflexions sur l'usage de la force et sur la façon de faire la paix avec soi-même.
Dans cet univers glauque où la Croix n'a laissé que des cendres et des déserts, seul le courage et le sacrifice peuvent permettre à l'humanité de survivre. Un mince espoir dans une nuit noire.

Surprise.
Pour son premier album, Darcy van Poelgeest s'aventure dans un futur terrifiant pour construire un monde violent et creepy où la foi est devenue une folie et où la colère brûle tout sur son passage.
Grâce au dessin de Ian Bertram et aux couleurs de Matt Hollingsworth, Little Bird prend son envol et se permet toutes les folies.

Lien : https://justaword.fr/little-..
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