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Critique de AugustineBarthelemy


Yvonne, 80 ans, a toujours vécu une vie indépendante, même après le décès de son mari, dans sa ferme où elle a passé sa vie de jeune fille, de femme, de mère et de grand-mère, une demeure chargée de ses souvenirs, des plus heureux aux plus tragiques, des évènements amers ou joyeux qui traversent le temps et que l'on nomme la vie. Aujourd'hui, ses enfants sont partis, ses petits-enfants, adolescents, la délaissent un peu. Son seul compagnon est son vieux chien. Mais Yvonne le sent : l'énergie lui manque, la solitude lui pèse. Il est temps pour elle de vendre et de rejoindre la dernière étape d'une vie finissante : l'EHPAD de sa ville.

Là-bas, ce ne sera plus qu'une chambre, la fin de l'intimité, des activités ridicules pour maintenir un semblant d'éveil intellectuel et une infantilisation insultante de la part des soignants. C'est un choc pour une femme indépendante et déterminée à mener un train de vie avec un petit grain de folie. Mais l'EHPAD est aussi un mouroir que les familles désertes, les visites sont rares et espacées. Les résidents ne sont plus que des ombres, Alzheimer et le gâtisme en embuscade. Heureusement, la vie ne s'éteint jamais tout à fait et Yvonne retrouve, à sa grande surprise, un peu de passion dans les bras d'un homme. le sexe est, bizarrement, bien plus facile : les complexes sont passés en même temps que les corps ont fané, on sait que c'est peut-être le dernier instant de grâce de la passion, on en profite comme on ne sait pas le faire quand on est jeune. Mais le temps et l'ennui sont les ultimes ennemis de ces corps et de leur esprit. Et malgré sa lutte, Yvonne, peu à peu, oublie.

Comment vous dire ce que j'ai ressenti à la fin de ma lecture ? le Plongeon est une belle bande dessinée, mélancolique et douce-amère, mais le sujet m'a déprimée. Sans doute parce que rien ne me fait plus peur que la déchéance qui va avec la vieillesse, et la dépendance qui l'entraîne. le destin d'Yvonne n'est pas enviable, il est même ce que je redoute franchement le plus. La coloration, dans des tonalités bleues et vertes – qui ne sont pas sans rappeler les couleurs dominantes dans les derniers autoportraits de Picasso, dit assez l'atmosphère de fin de vie qui plane sur cet EHPAD. Bien sûr, les auteurs n'ont pas livré une histoire qui se veut tire-larmes ou misérabiliste : il y a des situations qui prêtent franchement à sourire, Yvonne, dans sa lutte pour rester vivante, est touchante.

Le Plongeon est une bande dessinée réaliste sur la fin de vie. Les histoires des pensionnaires sont parfois bouleversantes, à l'image de cette épouse qui ne peut faire autrement que de confier son époux atteint d'Alzheimer à l'institution, n'ayant plus la force et l'énergie de s'occuper de lui. Les larmes qu'elle verse sont aussi émouvantes qu'horribles. Je suis certainement conditionnée par mes propres peurs, mais l'idée qu'un EHPAD n'est qu'un mouroir ne m'a pas quittée, et voir ces personnages dans l'attente, attente d'une visite qui ne vient pas, attente de la prochaine maladie, attente de l'oubli, attente de la mort, m'a honnêtement chamboulée.
Lien : https://enquetelitteraire.wo..
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