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Critique de Seraphita


Ils formaient un groupe de jazz, s'étaient installés dans une maison à l'écart, sur une île. Ils répétaient au fond de leur cave, se disant qu'ils formaient le quartet de jazz en passe de conquérir la renommée. Ils s'étaient donné des surnoms, en avaient même jusqu'à endossé l'identité, formant le Black Note. Puis le drame est survenu, la maison a brûlé. L'un d'eux, Paul, n'est plus. Depuis la clinique où il est enfermé, l'un des membres du groupe prend la parole, pour lui-même, pour l'un des patients aussi. Il retourne en pensée à sa vie d'avant, sa vie au sein du groupe. Paul hante ses idées, il se dit même habité par Paul, et il bute toujours à l'instant des flammes qui ont détruit l'existence du quartet et oblitéré sa vie. Que s'est-il passé ce soir-là ?

« le Black Note » est un court roman de Tanguy Viel publié en 1998. L'intrigue mystérieuse se déploie au fil d'une centaine de pages, en épousant les pensées perturbées de l'ex-trompettiste du groupe, pensées itératives et spiralaires. Pour tenter de restituer sa vérité du drame, il lui faut dépasser des peurs, celles d'être condamné, d'être aliéné entièrement par le fantôme de Paul, Paul dont il pense qu'il vient caler ses pensées dans les siennes, se terrer derrière ses yeux et utiliser sa langue pour former des mots.
Le narrateur tente de formuler l'indicible, se rapprochant en cercles concentriques du noeud dramatique, reculant de peur de faire vaciller sa faible raison, y revenant, comme attiré par les flammes. En déployant des mots en phrases, il reste habité par les trous inéluctables dans le langage qui achoppent à dire l'essentiel. D'ailleurs, l'un des membres du groupe, à ses côtés à la clinique, s'est muré dans le silence.
Tanguy Viel vient admirablement épouser les contours de cette déréliction par un style bien à lui, fait de phrases qui s'emballent et en viennent à oublier leur point final. Il faut accepter de suivre un discours haché, discontinu, comme troué par un drame irrévocable, pour prendre plaisir à filer dans les phrases, les mots, les souvenirs d'un être abîmé, pour parvenir à reconstituer les lambeaux d'une vérité, arrivé au terme de l'intrigue.
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