AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de elleaimelire


Emma, Angèle, Karine. Trois femmes, trois générations. La grand-mère, la mère, la fille.

Emma a accouché d'Angèle quand elle habitait au Maroc. Dès le début, le lien ne s'est pas fait. La fusion n'a pas fonctionné. Emma n'arrivait pas à s'occuper d'Angèle. Ni à l'aimer.

"Ce secret prend toute la place, en une bouillie informe qui fait lien entre elles.La mère ne peut pas aimer l'enfant. Comment fait-on dans ces cas-là ? Vers qui se tourner ? C'est une chose indicible, inacceptable. L'enfant et la mère se sentent mal ensemble. Qui a commencé ? Comment l'expliquer ?"

Dès lors rien n'est simple dans cette famille dans laquelle l'instinct maternel est absent. L'amour maternel ne s'exprime pas. Il est absent. La maternité se transforme en une montagne insurmontable. Jusqu'à engendrer de différentes manières la souffrance de celle qui donne la vie et de celle qui naît.

Alors, quand Angèle est devenue mère à son tour, elle reproduit le schéma. L'amour pour Karine ne se manifeste pas. Et Karine ne trouve pas sa place dans ce foyer familial abandonné par le père. Ce foyer où Angèle décide de tout. Angèle a même installé sa fille dans la salle de bain pour pouvoir louer sa chambre à des étudiants. Ainsi, Karine dort près de la baignoire. Parce qu'Angèle contrôle la vie des autres. Elle ne peut vivre sans avoir l'impression de les posséder.

"Karine n'ose pas insister de peur qu'Angèle, telle une déesse capricieuse, d'un simple mouvement de son sceptre mécontent, la disgracie. On adore une déesse, on ne la conteste pas."

Car Angèle est une femme manipulatrice. Elle vit au travers des autres, les conseille, ordonne. Elle vit sa vie par procuration. Et elle en oublie de vivre pour elle. Impression de puissance, de pouvoir pour un cas de solitude extrême finalement.

Dans Les Dévorantes, les personnages ne sont pas attachants. Ces trois femmes sont froides, tristes. Elles ne s'épanouissent pas dans leur existence. Mais l'intérêt du roman réside justement dans cette facette de leurs trois personnalités. Leur famille est dysfonctionnelle. Les liens maternels sont brisés. Ils n'ont jamais vraiment existé.

Et d'ailleurs, quand Karine devient mère à son tour, elle n'arrive pas à être la mère qu'elle voudrait. Elle aurait tellement voulu être différente de sa mère. Alors, elle pense trouvé l'équilibre dans l'éloignement. Comme Angèle qui est partie loin d'Emma, Karine s'en va. Construire sa propre vie loin de la cellule maternelle semble un remède dans un premier temps.

"Comment savoir qu'on aimera être mère avant d'essayer ? Personne ne lui a rien dit à ce sujet, est-ce que c'est pareil pour toutes les mères ? Bien sûr, c'est le lot des femmes de ne pas souhaiter tous les enfants qu'elles ont."

Les Dévorantes, c'est véritablement le roman d'une maternité loin d'être évidente. Une maternité qui engendre de la souffrance. Des femmes qui dévorent les autres et grignotent leur bonheur.

"Elles formaient ce trio imaginaire de reproduction de la haine."

J'ai beaucoup aimé l'écriture de Marinca Villanova. Sa plume est sensible et poignante. Elle transmet les émotions. de ses mots transparaissent la tristesse et le mal-être. La détresse même peut-être. Qu'il est difficile d'être mère. L'instinct maternel ne vient pas dès lors qu'on est une femme. Marinca Villanova décortique cet aspect de la maternité souvent tu. Et elle analyse la reproduction du schéma génération après génération : quand le lien se brise entre mère et fille dès la naissance.

En bref, Les Dévorantes, c'est un roman qui explore les difficultés de l'amour maternel, et les souffrances que ces femmes s'infligent à elles mêmes et aux autres. Un roman à la plume fine et délicate qui m'a beaucoup touchée.
Lien : https://ellemlireblog.wordpr..
Commenter  J’apprécie          100



Ont apprécié cette critique (10)voir plus




{* *}