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Critique de Malaura


Créée dans les années 1970 par l'écrivain espagnol Manuel Vazquez Montalban, la série « Pepe Carvalho » comptent plus d'une vingtaine d'intrigues policières et s'échelonnent jusqu'en 2003, date de la mort de son créateur.

Le personnage récurrent, Pepe Carvalho, est détective privé à Barcelone. Homme charmant, un brin désabusé, d'un tempérament solitaire, Carvalho aime les femmes, la gastronomie et les livres…qu'il fait flamber dans sa cheminée après les avoir lus (!) pour ne pas être perverti par certaines des idées qu'ils contiennent…C'est vrai, nous qui sommes des amoureux des livres, avons du mal à concevoir cette pratique singulière ! Et pourtant, on s'y fait, Carvalho choisissant avec le même soin l'ouvrage à rôtir et le vin qui accompagneront son repas.

Ce fin gourmet et excellent cordon bleu ne conçoit d'ailleurs pas de terminer sa journée sans un bon dîner préparé par ses soins ou par ceux de son assistant et homme à tout faire Biscuter, le tout agrémenté d'une bonne bouteille de vin et confortablement installé devant la cheminée où peu à peu il réduit en cendres les livres de sa bibliothèque…
Souvent, son amie Charo, prostituée indépendante avec laquelle il entretient une relation affective plus ou moins régulière, s'invite dans sa maison de Vallvidrera nichée sur les hauteurs de Barcelone.

Manuel Vazquez Montalban a mis beaucoup de sa propre personne et de sa propre histoire – notamment dans les aspects politiques - dans ce personnage, ancien communiste, antifranquiste, ayant connu les geôles du Caudillo, qui fut un temps agent de la CIA, avant de revenir après la Movida, dans sa ville de Barcelone et d'employer son temps comme « renifleur de braguette » selon l'expression en vigueur de la police espagnole pour qualifier son activité de détective privé.

Ne dépendant de personne, pas même de ceux qui le paient pour résoudre des affaires privées, l'activité d'enquêteur de Carvalho lui permet, non seulement d'afficher son caractère entier, libre et anticonformiste, mais aussi, en observateur subtil et cynique de la société espagnole, de nous livrer sa vision souvent désabusée des dérives du pays. Témoin blasé de son époque, il nous fait arpenter la moindre parcelle de bitume d'une Barcelone qui, entre ombre et lumière, se révèle fortement contrastée. Des ruelles sombres et labyrinthiques du quartier des artisans en passant par les Ramblas ou les quartiers populaires du Barrio China, c'est à une longue et belle balade dans la ville, loin des circuits touristiques, à laquelle nous convie Pepe avec son allure décontractée et son regard faussement désinvolte.

Dans « Trois d'histoires d'amour », fidèle à son habitude, Pepe se partage entre plaisir de bouche, flambées de livres et enquêtes policières.
Manuel Vazquez Montalban a souhaité développer le thème de l'amour dans l'univers de Carvalho, avec ces trois grosses nouvelles réunies par le sujet commun du sentiment amoureux.
Dans « Les cendres de Laura », Carvalho est en proie au souvenir mélancolique d'une brève liaison vécue avec une jeune femme qu'il avait aidé autrefois à prendre son envol. Cette dernière est retrouvée morte assassinée et le détective, submergé de nostalgie, se demande si son statut de Pygmalion dans l'existence de Laura n'a pas finalement précipité sa mort.
Dans « Ce qui aurait pu être et n'a pas été », la mort d'un vieux rocker expose la problématique des amours qui tuent. La victime à force d'abuser de son emprise sur ses partenaires, n'aurait-elle pas engendré un processus de destruction contre elle-même ?
« La fille qui ne savait pas dire non » quant à elle, va perturber Carvalho plus que de raison. Cette singulière femme au caractère étrange et amoral, indifférente à tout comme « une autiste douée de parole », désarçonne notre détective, qui, malgré sa connaissance approfondie des travers humains, a bien du mal à s'expliquer l'ampleur du cynisme auréolé d'irresponsabilité de cette jeune femme qui semble planer sur l'existence et sur qui tout glisse sans accrocher.
Des histoires spirituelles couronnées d'un humour plein d'à-propos, des personnages aux petits oignons dépeints d'un trait sagace, des dialogues savoureux et subtils et des recettes de cuisine qui donnent envie de se mettre à table…
Pepe Carvhalo…ou l'appétit vient en mangeant…

Carvalho a connu deux adaptations télévisées, l'une au milieu des années 1980, avec l'acteur espagnol Eusebio Poncela, et l'autre entre 1999 et 2004, une série diffusée sur Arte avec Juanjo Puigcorbé dans le rôle titre.
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