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Critique de Melisende


Les Amazones de Bohême, tout un programme. En découvrant par hasard ce titre dans le rayon de la petite bouquinerie Temps Livres, j'ai été séduite à la fois par l'illustration de couverture mais aussi et surtout par la quatrième de couverture. Des femmes guerrières, érudites, émancipées et indépendantes au VIIIe siècle… la féministe en moi ne pouvait qu'approuver et être très curieuse !
Peut-être avais-je trop d'attentes ? Toujours est-il que je suis sortie de ma lecture un petit peu déçue voire mitigée. Je lui reconnais de nombreuses qualités mais je n'ai pas été emportée autant que je l'aurais voulu et je n'ai pas toujours adhéré au message soulevé. Quel dommage !

Je dois avouer que je ne connaissais absolument pas ce mythe, apparemment considéré comme le mythe fondateur de Prague mais je ne manquerai pas de fouiller un peu partout pour en apprendre plus. En revanche, les Amazones, tout le monde connaît plus ou moins les origines du terme et ce qui s'y rattache… J'étais donc franchement emballée par l'association des deux, certaine que j'allais y trouver des héroïnes auxquelles m'attacher.
Malheureusement pour moi, je ne me suis jamais vraiment sentie proche d'aucune d'elles. Danna est peut-être celle avec laquelle je me serais sentie le plus d'affinités, peut-être parce que j'ai senti en elle une plus grande « tolérance », un discours et des convictions un peu moins extrêmes… malgré tout, je ne me suis jamais véritablement attachée à elle. Avec les autres héroïnes, la distance fut encore plus grande, à mon grand dam. La princesse Libuse, mi-politicienne mi-prophétesse, est une figure intéressante mais on la suit finalement peu (elle meurt rapidement) et de loin la plupart du temps. Wlasta la guerrière aurait pu me convaincre grâce à sa combativité, sa détermination et son indépendance… mais j'ai été gênée par son discours très anti-hommes.

Alors oui il s'agit clairement d'un roman féministe et je pense que Joëlle Winterbert ne s'en cache pas mais pour moi, l'important dans le combat féministe, c'est de trouver une égalité entre les deux sexes et de ne surtout pas tomber dans l'opposition ou encore pire, dans la domination des femmes.
Ici, la très grande majorité des personnages masculins sont présentés comme des brutes épaisses, des dominants machos et dans la majorité des cas comme des violeurs en sommeil. Les seules figures masculines qui n'utilisent pas la violence sont peut-être les deux émissaires de Charlemagne, envoyés là pour christianiser le pays… mais autant dire que pour ces hommes d'Eglise, les femmes n'ont pas une place de choix. En bref, j'ai eu l'impression d'un combat très net entre hommes et femmes et qu'en gros, les hommes sont des méchants et les femmes sont des victimes qui passent leur vie à tenter de se défendre.
Je suis consciente que dans une société patriarcale du VIIIe siècle, dans le centre de l'Europe (la Bohême donc), la place de la femme n'était sans doute pas très enviable et qu'entre coups et viols, elles ne devaient pas se marrer tous les jours. Mais j'ose tout de même espérer qu'à l'époque déjà, les hommes – bien « qu'éduqués » dans l'idée de leur supériorité – n'étaient pas tous des monstres… si ? Attention, beaucoup de scènes assez violentes sont décrites et malgré la jolie plume de Joëlle Winterbert, le sujet reste sensible et difficilement supportable, en tout cas pour moi. J'aurais tout simplement aimé un peu plus de mesure, d'équilibre, de tempérance dans le propos. Peut-être trouver une ou deux figures masculines plus « aimables » et quelques femmes moins portées à haïr le sexe opposé.

Malgré tout, une partie de moi a apprécié cette histoire et a été très impressionnée par le courage et la fougue de ce groupe de femmes, bien décidées à créer leur propre état indépendant où elles pouvaient vivre en parfaite liberté : aimer qui elles voulaient (hommes ou femmes, ou les deux, et parfois en même temps !), avoir des enfants, s'instruire… sans devoir rendre de compte à personne. C'est particulièrement avant-gardiste et j'ai aimé cette combativité précoce.
Je regrette par contre la trop grande rapidité de l'intrigue. Plusieurs années s'écoulent et nous sont contées en moins de 300 pages, difficile de suivre le rythme. Et de ce fait, encore plus difficile de s'attacher vraiment aux nombreuses figures que l'on suit tour à tour d'un point de vue externe. Je pense que j'aurais aimé apprendre à connaître une des héroïnes en particulier et découvrir l'aventure d'un point de vue interne unique grâce à l'utilisation du « je ». L'émotion aurait peut-être été plus grande pour moi, là je suis restée trop en retrait et je suis la première déçue.

Les Amazones de Bohême reste une lecture en demi-teinte pour moi. Même si j'ai aimé les thèmes proposés et la plume maîtrisée de l'auteure, j'ai eu un peu de mal avec les choix de Joëlle Winterbert et le discours que j'ai perçu (peut-être ai-je eu une mauvaise perception et en aurez-vous une différente…). Je garde tout de même en tête ce mythe et surtout le nom de Joëlle Winterbert qui semble avoir écrit d'autres choses (notamment en Imaginaire) particulièrement intéressantes…
Lien : http://bazardelalitterature...
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