Altruisme, compassion, empathie, amour, conscience, sens de la justice, tout ce qui confère à la société sa cohésion et met la supériorité de notre espèce à l'épreuve a, dorénavant et sans conteste, une solide base génétique. Voilà pour la bonne nouvelle. La mauvaise c'est que si ces vertus sont en quelque sorte bénéfiques à l'ensemble de l'humanité, elles n'ont, en revanche, pas évolué dans un sens capable de concourir au "bien de l'espèce". Ce serait plutôt le contraire : Il est plus clair que jamais désormais que le sens moral peut-être éveillé ou assoupi en fonction d'intérêts strictement personnels, et que nous avons une une tendance naturelle à oublier jusqu'à l'existence des commandes qui le déclenchent.(...) (page 28)
Ne pas se marier , écrit-il (Darwin), préserverait "la liberté d'aller et de venir, de fréquenter une compagnie choisie (et rare), de converser au club avec des hommes intéressants, d'échapper aux visites à la famille et aux courbettes de toutes sortes, aux dépenses et aux soucis que procurent les enfants, aux éventuelles querelles - perte de temps-, à l'impossibilité de pouvoir lire le soir, à l’embonpoint et à la paresse, à l'anxiété et aux responsabilités : moins d'argent pour les livres et le reste...., et si nombreuse progéniture, au fait de devoir trimer pour l'élever".
Et la culpabilité qui, initialement, servait peut-être juste à accélérer le paiement des dettes en souffrance pourrait endosser une deuxième fonction : accélérer la confession d'une tricherie sur le point d'être découverte (n'avez-vous pas remarqué la corrélation qui existe entre culpabilité et risques de se faire prendre ?) (page 335)
Or ces progrès passent par l'identification des commandes , Charles Darwin, par exemple, les partage avec l'humanité tout entière. Il s'occupe de sa famille dans certaines limites. Il est en quête d'un statut. Et d'une vie sexuelle. Il tente d'impressionner ses pairs et de sur plaire.Il essaie de paraitre bon. Il forme des alliances qu'il entretient, il tente de neutraliser ses rivaux. Il se leurre lui-même si les objectifs évoqués ci-dessus lui imposent de le faire. Et il ressent tous les sentiments - Amour, désir, compassion, respect, ambition, colère, peur, tourments de la conscience , de la culpabilité, du devoir, de la honte, etc. - Ce qui poussent les êtres humains vers ces objectifs. (page 512)
(Toute ma modeste vie)