Un monde immense : Comment les animaux perçoivent le monde

Un monde immense pour un livre sous forme d'essai scientifique qui m'a paru l'être tout autant, immense, pour le moins passionnant. Ed Yong a parcouru le monde animalier à la rencontre de chercheurs spécialistes d'espèces ou de sens, à la découverte merveilleuse des différentes fenêtres sensorielles sur le monde, les Umwelt. Largement de quoi remettre en perspective la prédominance supposée de l'humanité – surtout par elle-même –, par l'appréhension des diverses panoplies sensorielles développées sur le long terme darwiniste. Et autant dire qu'elles sont nombreuses, merveilleuses, sublimes ces bulles sensorielles, quand on se laisse aller – certes poussé par la puissance de cet essai – à quitter l'ancrage anthropomorphique pour considérer le pourquoi et le comment du développement animalier, pour tenter de comprendre et de ressentir – toujours en vain, ce que cela fait d'être chauve-souris, canard, dauphin, condylure étoilé, j'en passe et j'en oublie. Un florilège de merveilles de la nature organisé selon des sens, les nôtres comme les autres, pour découvrir le rapport au monde de différentes espèces surtout méconnues, proches ou éloignées, voire carrément inconnues, du moins en ce qui me concerne. Connaissez-vous les membracides et leur sens sismique ? êtes-vous certains de bien connaître le canard dominical qui becquette dans l'eau au gré de nos promenades digestives ? Avez-vous bien mesuré la complexité hallucinante de l'écholocalisation de la chauve-souris ? Si vous n'êtes certains de rien et que vous aimez le sublime dès lors qu'il peut se nicher dans un jardin (ou ailleurs), il ne vous reste qu'à foncer sur cet essai dense et flamboyant, votre vue supposée en HD et trichromate ne devrait pas vous leurrer face à l'éventail des nouveautés.

« Percevoir le monde à travers d'autres sens revient à trouver de la splendeur dans le familier, du sacré dans le monde profane. Des merveilles cachées existent dans un simple jardin. Ici, les abeilles mesurent le champ électrique d'une fleur, là les membracides créent des vibrations mélodieuses dans les plantes, ailleurs les oiseaux jouent avec des palettes de couleurs allant des « roulets » aux « verlets ». »