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Critique de isanne


Un cri d'amour d'un père à sa fille, Un cri poignant de celui qui dit tout son désarroi à celle qui a justifié sa vie.
Alors que sa fille a été arrêtée pour un délit, son père ouvre son âme et lui dit tout ce qu'il a toujours tu, croyant la préserver en tenant à distance la persécution et la cruauté des hommes.
De la fuite après l'attaque du village dont ils sont les seuls survivants, miraculés déjà, à travers les paysages hostiles mais qui le sont moins que certains hommes. Fuyant la nuit, se terrant le jour, trouvant refuge dans d'autres villages, auprès de ceux à qui on peut accorder la confiance, confier la vie qui vient de naître et qu'on a à peine nommée. Justement, elle se nommera Adama , celle qui renaît « de la terre rouge »…
Il dit la détresse d'être, de fuir avec cette fragile vie sanglée sur le dos, comme une raison d'avancer , de vivre encore un jour, quelques pas, quelques rencontres... Il lui confesse combien l'abnégation de son être frêle lui a donner le courage qui le portait, le faisait avancer, la volonté de trouver un havre où se reposer et repartir quelques paroles ou quelques regards bienveillants en guise d'encouragements.
De havre, en fait, il n'en trouvera pas, seulement le chemin escarpé de ceux qui se sauvent, qui fuient, qui aspirent à un meilleur : ceux qui "migrent".
S'il évoque peu les conditions du voyage, il dit à bas mots les rencontres heureuses ou malheureuses, les aides, les directives, l'enfermement et les accueils d'un jour, d'un mois, parce qu'ils faut toujours partir, aller ailleurs, toujours chercher cette main qui ne ne se tend pas. Il dit le pouvoir de l'enfant qu'il protège à ouvrir les âmes de ceux qui les crosent : le regard se fait plus appuyé, l'indifférence moins lourde...

Alors quand la grande ville rêvée s'offrira à son regard, croyant qu'il atteint l'objet de sa quête, il préférera se taire, et cacher dans un mutisme qu'il imagine bienfaiteur, tous les affres de la fuite et le mépris et l'indifférence dont ils ont souvent été l'objet.
Adama doit vivre, le père se doit de toujours être là, de la veiller, de la protéger, de la guider dans la vie. Elle doit grandir, ignorante jusqu'au possible du chaos des hommes, pour devenir une petite fille et une jeune femme qui sourit, qui rit, qui embrasse le monde ou ce qu'elle en devine dans sa proximité.

La confession désespérée de ce père qui s'est oublié pour sa fille alterne avec le récit murmuré par les lèvres de celle-ci de son acte, de sa vengeance : comme si le charbon ardent de la violence enfoui dans le coeur de l'enfant et du père chassés de leurs terres devait , à un moment, ressurgir à la face des hommes.

Un texte court, moins d'une centaine de pages, mais d'une richesse inexprimable, d'un désespoir palpable, qui broie le coeur et l'âme de celui qui le recevra.
En quelques pages, le récit de l'exil et sa souffrance inexprimée, de ceux qui la subissent et pour ceux , toujours trop nombreux, qui refusent de l'entendre.

(Juillet 2021)
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