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Critique de fuji


Mélissa jamais là où il faudrait, où elle devrait !
L'incipit de ce livre est juste une merveille car le talent de Carole est là, avec une économie de mots elle vous flingue, vous met hors combat. Quand vous reprenez votre souffle c'est pour plonger dans cette histoire, vous savez celle qui est évoquée régulièrement dans les médias sans que vous ayez le temps d'en saisir les tenants et aboutissants puisqu'une info chasse l'autre.
Mehdi 18 mois est MORT.
Mais pourquoi ce petit être qui aurait dû avoir la vie devant lui, meurt dans les bras de sa mère par une nuit glaciale dans l'indifférence de tous ?
Mélissa Carpentier est issue d'un milieu simple, où la vie s'écoule au fil des jours et des transformations de la société. Picorer des instants de partage pour en faire des boulettes de bonheur car comme souvent dans les milieux simples, l'amour et la fierté sont taiseux.
Mais elle a « la chance » de faire des études :
« Sans le vouloir, sans y avoir mis une volonté de fer, j'avais eu une scolarité exemplaire et ce fut tout naturellement qu'au moment de décider d'une orientation, on m'avait conseillé de viser les grandes écoles… » et ce sera le sésame pour le saint Graal d'une classe préparatoire à Paris et ainsi de voir que la vie est différente voire multiple.
Et son corps la trahit, celui qui a évolué et qui a été accepté devient un objet encombrant dans ce lieu de haute culture. Il est hors cadre.
Alors elle crée son blog où sous le pseudo d'Artémis elle se fait flamboyante.
Là cachée derrière son écran elle a toutes les audaces. La liberté derrière un miroir aux alouettes. Mélissa/Artémis brille, brille !
Dans la réalité c'est une jeune femme qui a le savoir mais pas le savoir-être ni le savoir-faire, indispensable pour un bon développement en société.
C'est la fracture : elle n'est plus du monde des siens et pas de l'autre monde non plus.
Mélissa passe de l'autre côté du miroir, le virtuel pour sésame.
Ainsi enrôlée et valorisée Mélissa se perdra avant de s'être connue.
Cet enrôlement, où elle se croit reconnue et appréciée, annihile tout jugement chez elle jusqu'au drame.
Mehdi est MORT.
Disparaître, Mélissa s'y emploie.
Commencent ses errances et sa naissance.
Où mieux qu'aux USA, pays protéiforme pourrait-elle errer ?
Il lui faudra du temps pour apprendre à dire NON.
La rencontre de Melissa et Jane est très belle car c'est l'acceptation de l'autre avec bienveillance donc un véritable échange.
Je n'ai jamais eu d'empathie pour cette jeune fille, au cours de ma lecture. Elle est le symbole de toute cette jeunesse qui flotte à côté de ses pompes et pour qui c'est toujours la faute des autres si…. S'ils n'ont pas de boulot, s'ils ne sont pas reconnus et j'en passe. Mais c'est de ceux-là dont on parle toujours. Alors qu'il y a des jeunes qui se dévouent dans des associations pour apporter un peu de réconfort à ceux qui en ont besoin et ceux-là demeurent invisibles.
Toute l'énergie qu'ils dépensent en négatif sans voir que leur meilleure aide se trouve tout simplement au bout de leur bras, et qu'il faut retrousser ses manches, penser par soi-même, et que c'est cela la vie, des périodes de bonnes choses, de moins bonnes, de rencontres et d'échanges.
J'ai aimé ce livre pour ce qu'il dit de notre société avec force comme toujours chez Carole Zalberg, qui sait dire avec cette économie de mots qui est sa marque. Format court, mots et images percutants. Narration dense, intense qui vous fait vibrer et vous interroge.
Chez Carole il y a toujours la lumière au bout du tunnel.
Ici c'est un exemple de l'abjection qui devient quasi quotidienne. Des adolescents qui tuent d'autres adolescents sans conscience qu'ils sont dans la vraie vie. Ce n'est pas de cette société que je veux.
Un livre à inscrire dans les lectures du collège et lycée pour une réflexion avec à l'appui des coupures de journaux relatant des cas similaires pour faire émerger des consciences, c'est un travail qui se fait pour les horreurs de la seconde guerre mondiale, mais il faudrait s'attaquer à notre monde quotidien.
Il serait temps de réinventer notre société en mettant l'humain au coeur de la nature et la nature dans son coeur.
Utopique ? Il est l'heure d'ouvrir le débat.
©Chantal Lafon
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