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Critique de Presence


Ce tome fait suite à Daredevil by Chip Zdarsky Vol. 2: No Devils, Only God (épisodes 6 à 10) qu'il faut avoir lu avant. Il comprend les épisodes 11 à 15, initialement parus en 2019, écrits par Chip Zdarsky, dessins et encrés par Marco Checchetto, avec l'aide de Franceso Mobli pour les épisodes 14 & 15. La mise en couleurs a été réalisée par Nolan Woodward, avec l'aide de Rachelle Rosenberg pour l'épisode 15. Les couvertures ont été réalisées par Julian Totino Tedesco. Il contient également les couvertures variantes réalisées par Amanda Conner, Khoi Pham, Declan Shalvey, Skan, Ryan Brown.

Dans un immeuble du Bronx, une femme court vers la porte de la chambre de son appartement et s'enferme : son conjoint violent commence à taper sur la porte et à vouloir la défoncer. Elle s'arcboute contre la porte et il n'arrive pas à la forcer. Une silhouette masquée entre par une fenêtre et passe son bas autour de la gorge de l'agresseur. le conjoint violent essaye de secouer son agresseur dans tous les sens, sans réussir à lui faire lâcher prise. Il finit par s'évanouir et tomber à terre, ce n'est qu'à ce moment que cet homme portant le haut du costume de Daredevil le relâche. Quatre policiers sont arrivés et ont sortis leur matraque : l'ersatz de Daredevil va passer un sale quart d'heure. Sur un toit pas très loin de là, Elektra Natchios est en train d'entraîner Matt Murdock, qui a noué un foulard blanc sur sa tête. Il finit par réussir à parer deux coups, avant qu'elle n'en décoche un troisième et l'envoie à terre. Elle le laisse récupérer, et se jette dans le vide. Elle lui indique qu'il doit regagner sa confiance en lui et ses capacités de combattant. Elle va remplir le rôle de Stick pour lui. Dans un autre immeuble, Izzy Libris est en train de parler affaires de famille avec son fils Thomas Libris : elle ne lui laisse pas le choix et il se fait mettre à la porte du bureau par Luca. En sortant, il tombe face à son épouse Mindy qui porte leur fille dans les bras : ils se disputent car elle a l'impression d'être en prison, et elle voudrait pouvoir rouvrir sa libraire.

Dans la rue, l'inspecteur Cole North est sur le siège passager de la voiture de patrouille de police, alors que son coéquipier l'inspecteur Greene est en train de conduire. North repense au fait qu'il n'a pas tout dit lors de son compte-rendu, qu'il a tu certaines informations, qu'il a été sauvé par Daredevil. Il est tiré de ses pensées : Spider-Man vient de faire son apparition et s'élance pour sauver une jeune femme en train d'être agressée, une mise en scène par des fonctionnaires de police. Trois individus émergent d'un fourgon avec un fusil lance-filet, et ratent Spider-Man. Celui-ci les neutralise avec ses toiles et emmène Cole North dans les airs, pour avoir une petite conversation avec lui. Matt Murdock se promène dans la rue et salue Sammy qui est en train d'ouvrir son épicerie : il vient prendre des nouvelles de Joe Carraro. Ce dernier arrive plus tôt que d'habitude. Il est déposé par Maria Carraro, la mère de Leo, le jeune homme que Daredevil a tué.

Même s'il ne s'était pas braqué contre les dessins de Lalit Kumar Sharma, le lecteur est content de retrouver Marco Checchetto, le dessinateur du premier tome. Il note toutefois qu'il s'est fait aider par un autre artiste sur les épisodes 14 & 15. Effectivement, il retrouve des dessins descriptifs avec un bon niveau de détails, et un rendu très réaliste. Dans le premier appartement, il peut voir les livres sur les rayonnages de la bibliothèque, chaque relief sur les portes de palier. Depuis le toit où Elektra entraîne Matt, il voit les façades des immeubles environnants, pour lesquels il ne manque aucune fenêtre, aucune ornementation au-dessus des fenêtres. Dans l'épicerie, il laisse son regard faire le tour des rayonnages : il voit les fruits et légumes, mais note quand même que les boites se ressemblent beaucoup. le bureau d'Izzy Libris bénéficie d'une belle bibliothèque sur 2 pans de mur, d'une table basse, d'un magnifique fauteuil en cuir. Lorsque Wilson Fis est reçu dans la somptueuse demeure des Hastings, il détaille avec plaisir la vue générale de l'extérieur du manoir, puis l'aménagement de chaque pièce intérieure (le salon, la salle à manger, l'immense salle de bains, la bibliothèque). Au fil des épisodes, il ralentit sa lecture pour mieux se projeter dans l'immense salle de lecture de la bibliothèque municipale New York Public Library à Manhattan, pour mieux regarder un juke-box dans un diner où North et Murdock prennent un café, ou encore le bureau des Hastings à un étage élevé d'un building avec une vue magnifique et imprenable. Il n'est pas possible d'isoler l'apport de Mobli dans les 2 derniers épisodes : quoi qu'il en soit, la qualité graphique ne baisse pas d'un iota tout du long de ces 5 épisodes.

Checchetto insuffle une personnalité spécifique à chaque personnage qui ont tous une prestance remarquable : une touche romantique pour Matt Murdock avec ses cheveux mi-longs, un calme massif pour Cole North du fait de stature impressionnante, un côté bondissant pour Spider-Man comme il se doit, une assurance inquiète pour Foggy Nelson qui tente le coup tout en sachant très bien qu'il ne fait pas le poids sur le plan physique. le lecteur est surpris par l'allure de Leland Owsley, moins rondouillard que d'habitude, avec un côté pas propre sur lui qui atteste de sa dangerosité, du fait qu'il ne respecte pas les règles. L'artiste prend soin de rendre le visage de Wilson expressif, ce qui l'humanise et lui donne une crédibilité accrue dans sa volonté de se conduire en citoyen respectueux des lois. le dessinateur parvient à combiner la présence physique imposante du personnage du fait de sa corpulence, et une forme de fragilité visible dans ses gestes du fait qu'il évolue dans des cercles sociaux dont il ne maîtrise pas les codes et les usages. Il n'y a qu'Elektra qui ne soit pas convaincante, Checchetto ne parvenant pas à en faire une femme fatale visuellement plausible. Les scènes d'action sont claires et lisibles et restent à un niveau humain, sans l'exagération qui accompagne les superpouvoirs (à l'exception de Spider-Man). L'artiste prend soin de préserver la logique de l'enchaînement des coups portés et des déplacements des personnages. Il passe en mode sens radar à deux ou trois reprises, se rapprochant du mode de représentation de Chris Samnee, sans en avoir ni la simplicité évidente, ni la dimension spectaculaire. La narration visuelle inscrit donc le récit dans un registre de nature réaliste, ce qui est en phase avec l'intrigue et sa tonalité générale.

Chip Zdarsky a visiblement reçu l'assurance qu'il resterait sur le titre un certain temps, et il peut développer son intrigue à un rythme posé. Matt Murdock refuse donc toujours de réendosser le costume de Daredevil, car il ne veut pas causer la mort d'un autre innocent par inadvertance. Pour autant, il ne veut pas rester sans rien faire, et il a pris conscience qu'il a besoin d'aide pour retrouver la forme nécessaire. le lecteur l'observe donc en train d'essayer de trouver une voix alternative à celle qui consisterait à réendosser l'habit de Daredevil. Il est plus ou moins intéressé par ce fil narratif car l'issue de cette tentative ne fait pas un pli : la série s'appelle Daredevil et finira tôt ou tard par revenir au statu quo de ce héros. Les relations interpersonnelles de Matt Murdock restent également dans des chemins bien balisés : une connivence avec Foggy Nelson qui n'exclut pas les désaccords, une relation pus tendue avec Elektra, et des tentatives pour amadouer l'inspecteur Cole North. Zdarsky n'innove pas réellement dans ce registre, mais il continue de diriger Matt Murdock de manière cohérente et convaincante.

Le lecteur se rend compte qu'il est plus intéressé par le comportement imprévisible et sauvage de Leland Owsley. Il suit avec encore plus d'intérêt Wilson Fisk jouant le jeu de manière honnête pour progresser dans la haute société. Tout comme Checchetto, l'auteur sait montrer tout le paradoxe de Fisk dans cette situation : toujours aussi imposant à la fois du fait de sa stature, mais aussi de son passé de chef d'un empire criminel, réputé pour ne pas hésiter à mettre les mains dans le cambouis en se battant physiquement. Or là, Fisk se retrouve dans un milieu social qu'il ne connaît pas à essayer de se montrer à la hauteur sans se faire avoir. Pour autant, il ne maîtrise toujours pas ses accès de colère, ce qui a de lourdes conséquences. En outre il n'avait pas bien pris la mesure de la force de volonté des Hastings, ni des moyens d'action dont ils disposent. Cela rend le parcours de Wilson Fisk très savoureux, au point que le lecteur ressent une forte empathie pour lui, et éprouve une réelle sympathie à son égard.

Séduit par le retour à une interprétation plus classique dans le premier tome convaincu du potentiel de l'intrigue générale dans le deuxième tome, le lecteur revient bien volontiers pour découvrir comment Matt Murdock va remonter la pente (car ça ne fait pas de doute), et pour retrouver les dessins précis et réalistes de Marco Chechetto. Ce dernier réalise des pages très soignées, même si le scénario ne lui donne pas l'occasion de les rendre aussi spectaculaires que dans le tome 1. Chip Zdarsky suit le chemin tout tracé pour la remise en forme de Matt Murdock. Il se montre plus inspiré pour la progression de Wilson Fisk.
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