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Critique de Pecosa


Qu'il est agréable de se tromper en choisissant un livre, c'est généralement là que l'on fait les plus belles rencontres. Je m'attendais en ouvrant Un meurtre à Jerusalem à lire un roman à la Batya Gour. Mais il ne s'agit pas d'un polar comme le laissait supposer le titre. Cette oeuvre remarquable de l'Allemand Arnold Zweig (1887-1968) a pour sujet ce qui peut être considéré comme l'un des premiers crimes politiques en Palestine mandataire.
"L'affaire de Vriendt", c'est l'assassinat en 1929 du professeur hollandais Isaac Joseph de Vriendt, représentant de la communauté juive orthodoxe et poète homosexuel qui entretient une relation clandestine avec un jeune arabe. Son ami Lolard B. Irmin, des services secrets britanniques va mener l'enquête et tenter de prouver qu'il ne s'agit pas d'un crime commis par la famille du garçon.
Dans Un meurtre à Jerusalem, Arnold Zweig restitue de manière magistrale la situation explosive qui règne en Palestine mandataire lors de l'été 1929, en s'inspirant de l'assassinat en 1924 de Jacob Israël de Haan, écrivain et journaliste hollandais représentant de la communauté Haredi, tué à Jérusalem par la Haganah en raison de ses activités antisionistes, et ses liens avec les dirigeants arabes. ( Affaire aussi connue que celle de Haïm Arlozoroff, voir Meurtre sur la plage de Léonid Guirchovitch et Qui a tué Arlozoroff de Tobie Nathan).
En transposant le meurtre 5 ans plus tard, Zweig dresse un tableau riche et vivant de la Palestine sous mandat britannique, véritable mille-feuille ethnique, politique et religieux. " Même à Jérusalem, la différence entre Juifs allemands, autrichiens, russes, anglais était extrêmement sensible, pour ne rien dire des contrastes entre Ashkénazes et Sépharades. S'il n'y avait eu les enfants, l'avenir aurait été inquiétant. Mais ceux-ci grandissaient ensemble dans la rue en une cohue parlant l'hébreu, mêlant couches, classes, origines, fonctions;"
A travers un crime fratricide, l'auteur scrute à la loupe une situation éminemment complexe précédant la fondation de l'état d'Israël, qui a encore un écho aujourd'hui. Pour mieux appréhender des sujets aussi variés que les conséquences de la Déclaration Balfour, l'échec de la cohabitation, les sentiments nationalistes exacerbés, l'accès au Mur des Lamentations, à la mosquée Al-Aqsa, l'essor de la ville de Tel-Aviv, il faut lire cet ouvrage écrit il y a 85 ans par un homme qui eut le malheur de voir brûler les exemplaires de son roman place de l'Opéra à Berlin en 1933, puis d'être censuré en R.D.A., où il vivait.
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