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Critique de stephanerenard


Qu'est ce qui a valu à cette jeune femme, profondément mystique, morte à 24 ans de la tuberculose, de connaitre un succès mondial?

Thérèse de Lisieux écrit son autobiographie, écrit des poèmes mystiques d'une rare intensité et d'une rare accessibilité pour des textes religieux : elle parle d'un ascenseur vers le ciel, et ce qu'elle décrit c'est une mystique profondément accessible, via la modestie et la petitesse.

On sort d'un XIXème siècle catholique catastrophique. Les grands prédicateurs du siècle précédent ont prêché l'enfer et la damnation, la peur du jugement dernier, la colère de Dieu. A travers des figures comme le curé d'Ars, qui ont marqué le siècle précédent, le monde catholique voit le chemin de la sainteté comme un chemin de privations, d'ascèses et de tentations repoussées aux prix d'efforts cauchemardesques. On sort également du jansénisme, cette doctrine stérilisante qui pousse aux excès car on n'est plus du tout sûr que la grâce de Dieu puisse venir au secours du pêcheur.

Et voilà que cette toute jeune femme propose un chemin pour les pauvres et les humbles, réalisant en cela la promesse de Jésus dans le long sermon des béatitudes : c'est à travers les plus petits, les plus humbles, que Jésus se révélera à chacun.
Et voilà que cette toute jeune femme pense que du fond de son couvent, par sa prière ardente, elle peut être missionnaire, aller au bout du monde, convertir les coeurs. Et voilà que son livre se propage, qu'il est lu des deux côtés du conflit pendant la seconde guerre mondiale, que des soldats invoquent son intercession auprès de Dieu et se disent protégés des balles ennemies.

Le phénomène littéraire que représente Thérèse de Lisieux n'est pas qu'un style mystique sans précédent, c'est véritablement le "ciel" offert à tous, alors qu'on avait tenté de le dérober aux simples et aux pêcheurs. Thérèse de Lisieux est un robin des bois du mysticisme. Mais le deuxième miracle, c'est que le clergé lui aussi soutient son message. Rapidement béatifiée, elle sera canonisée et même déclarée docteur de l'Eglise, une distinction qui n'a été donnée qu'à deux femmes, toutes deux du Carmel (Thérèse d'Avila), toutes deux proclamant un amour mystique.

Parlons de la nuit, car c'est un élément clé de la spiritualité du Carmel. Ce qu'on appelle la nuit, d'autres l'appelleraient perdre la foi. La nuit, c'est quand tout ce qui est sensible disparait, quand le doute devient plus fort que la conviction que Dieu est présent. Dans la spiritualité du Carmel (Jean de la Croix, Thérèse d'Avila, Thérèse de Lisieux), la nuit est le terrain propice à l'amour ultime : donner sans plus rien ressentir en retour, le don absolument gratuit. C'est un élément essentiel de cette spiritualité qui la rend nettement moins accessibles mais qui est un passage quasi obligé chez les grands mystiques.

Je recommande la lecture de ces très beaux textes qui sont de véritables trésors, et aussi l'écoute de ses poèmes, mis en musique par de nombreux compositeurs contemporains.
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