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Critique de bdelhausse


August von Kageneck est issu d'une longue lignée d'aristocrates, le genre qui produit des chevaliers, des évêques, des gens de bien, des propriétaires fonciers et des capitaines d'industries. A 20 ans, il conduit son panzer dans les plaines ukrainiennes. Lieutenant à 21 ou même pas. le voilà formatté, issu des hitlerjugend. Catholique convaincu, fervent et pratiquant, il a normalement dans les gênes la tolérance et l'altruisme, l'amour de son prochain.

Comment a-t-il pu tolérer, admettre, participer au nazisme? C'est une question qu'il se pose, en 1994, alors âgé de 70 ans, ressassant ses souvenirs de la Wehrmacht. Un coprs d'armée qu'il pense déconnecté du régime totalitaire. Les militaires ne font pas de politique. Les militaires sont au-dessus de cela. Ils n'ont pas commis d'atrocités, ils se sont "contentés" de faire la guerre pendant que les SS, les SA, les SD torturaient, gazaient, brûlaient...

Mais les choses ne sont pas si simples. Et August von Kageneck le reconnaît. du bout des lèvres parfois. Plus fort à d'autres reprises. On le sent tiraillé pendant une bonne moitié de l'ouvrage. On sent qu'il condamne les atrocités gratuites, mais qu'il admet les faits de guerre. Puis il lance quelques phrases bien senties, comme "l'occupant a toujours tort", ou ce genre de choses. Mais quelques pas en avant et quelques pas en arrière... il "justifie" les crimes perpétrés par les Allemands lors de la retraite de Russie par celles commises par les partisans... Comme si on pouvait admettre qu'un envahisseur se venge des crimes perpétrés par les populations envahies.

D'ailleurs, Von Kageneck ne dit jamais "résistants", les Russes sont des partisans. Ils ne résistent pas. Ils sont formattés par le bolchévisme... comme von Kageneck l'était par le nazisme (il le reconnaît).

L'auteur met tout le monde d'accord en admettant d'emblée que la guerre, c'est une faillite. On ne fait pas la guerre. Et quand il élargit son propos, passant de la Wehrmacht à la Bundeswehr, il parle d'une armée de citoyens, pas de militaires. le livre prend alors une dimension plus large.

Il admet le rôle actif des militaires dans les atrocités. Il n'est plus question de se défiler. Si des militaires ont pu croire à ce qu'ils faisaient et le faire "proprement" sans réellement se préoccuper des camps, Von Kageneck sait que l'état-major de la Wehrmacht a admis les visées d'Hitler. Ils ont souhaité, appelé de leurs voeux, une guerre d'expansion. Une guerre qui visait à étendre les terres allemandes aux plaines de Russie.

C'est souvent, malgré tout, ambigu. August von Kageneck a clairement fait du chemin. Il renie les meurtres, il fait comme le fitre l'indique un examen de conscience. Il ne fait pas un mea culpa. Il fait davantage. Il demande pardon. Il sait que cela n'efface rien. Il ne demande pas à ce que l'on efface quoi que ce soit, d'ailleurs. Ce n'est pas au lecteur qu'il demande pardon.

Ces ambiguïtés dans le propos, cette difficulté à admettre qu'il aurait dû, que beaucoup auraient dû, partir, délaisser Hitler, ne pas se faire complice m'ont perturbé. Mais August von Kageneck est honnête, franc et on ne peut pas lui refuser cet examen de conscience.

Le clou du livre est le dernier chapitre. Il vaut le détour rien qu'à lui seul. Il y est question de pardon demandé. de fraternité. de paix interne. de respect. de Dieu (je mets une majuscule par respect pour Von Kageneck). C'est poignant. D'autant plus poignant qu'august Von Kageneck y expose le différend qui l'oppose à son frère (croix de guerre avec feuilles de chêne) qui refuse de reconnaître ses erreurs. Il n'est pas donné à tout le monde de faire ce qu'August von Kageneck fait. Il faut lui en savoir gré.
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