Souvent donnée dans les récits d’avènement du monde comme la première des choses créées à partir des eaux primordiales, la mer se vit symboliquement comme le lieu essentiel de la vie, équivalent des eaux matricielles, mais aussi de la mort, de l’engloutissement dans un abîme empli de monstres, ou encore comme une étape transitoire qui permet la traversée vers la mort, d’une vie à l’autre.
Quand les vagues ne sont pas entraînées par un vent de surface, on les doit à un être des profondeurs, un dragon ou un serpent de mer qui s’ébroue, ou encore à un esprit des eaux, ainsi que le croyaient les peuples de la Terre de Feu : les Lakuma, esprits malins à la trompeuse apparence de baleines, pieuvres ou raies géantes, provoquaient sous l’eau les vagues qui enlevaient les pêcheurs de leurs canoës.
Une autre légende, bretonne, plus poétique et non moins triste, révèle que le jour des Morts, les âmes de noyés paraissent sur le sommet de chaque vague en « écume blanchâtre et fugitive ». Elles cherchent leurs proches et, quand elles les rencontrent, rires, pleurs, plaintes hantent la houle de leur désordre bruyant.
Cette superbe mer sur laquelle l’homme jamais ne peut imprimer sa trace.
Madame de Staël - Corinne ou l’Italie
Imaginaires ou réelles, perdues, abandonnées, fantômes ou fortunées, vertes, blanches ou noires, les îles figurent dans mille mythes, légendes, récits et contes. Leur éloignement, leur inaccessibilité, leur indétermination géographique, leur étrangeté en font les lieux de tous les possibles - où l’on peut accéder à l’immortalité comme se perdre à jamais. (..)
On pourrait penser que là s’arrête la symbolique des îles avec la lente disparition des mythes et légendes dans nos sociétés. Ce serait méconnaître la vivacité des symboles. La recherche d’évasion, l’aspiration d’hommes de notre siècle à un ailleurs, à une authenticité, à une transcendance ou plus simplement au plaisir font que les îles restent des lieux que l’on recherche et dont on rêve.