Delicatessen Dreyfys et Holgado
J'ai redoublé trois fois la cinquième avant de quitter définitivement les écoles sans aucun diplôme, même pas le certificat d'études que j'avais refusé de passer, ayant peur de ne pas l'avoir.
Malgré le mauvais traitement infligé à mes études, je pense avoir réussi ma vie. Grâce à la curiosité qui sans cesse en fut le moteur essentiel. Je ne manque jamais de dire aux jeunes -quand ils me le demandent- que le travail que je n'ai pas fait à l'école, je l'ai fourni plus tard, et que ce fut bien plus jouissif ! J'ajoute, aussi, qu'ils n'auront peut-être pas la chance de faire les rencontres que j'ai eu l'opportunité saine et volontariste de faire... car il n'y a pas de loi...
Deux femmes m'ont tout donné. Elles sont la base de ma formation et de mes déformations. Je leur dois tout, c'est-à-dire mes cheminements de carrière. Il s'agit de Tania Balachova et d'Armande Altaï. ... Tania, elle, m'apporta le rêve, l'imagination, la liberté d'inventer et Armande me permit d'atteindre la conscience et la confiance dans toutes les formes de musicalité en moi et dans tout ce que je touche.
Alors, la maréchaussée est venue me confirmer leur aimable invitation à m'affecter à la caserne des isolés à Rueil-Malmaison, la bien citée. J'y suis arrivé avec mon carton à chapeau, maquillé comme une voiture volée et parfumé de cuir de Russie. Une vraie poupée passant dans une haie d'incorporés comme moi mais prêts à l'emploi, prêts à monter avec leur barda dans les camions pour se rendre à Neuf-Brisach... dans le génie ! ... Le lendemain, visite médicale et passage devant les sept barbons du conseil de réforme. Je fis un passage éclair et fus dispensé, réformé P4...
L'oisiveté n'étant pas mon fort, j'allais dévorer les stocks de la cinémathèque de Chaillot. Cela me coûtait moins cher que les cours et j'y apprenais davantage !