Que signifie être autrice et féministe ? Jusqu'à il y a peu, je ne me doutais pas que la question puisse être si épineuse. Et puis, il y a eu cette rencontre publique, où l'on nous a expliqué que, en vertu du combat féministe, les femmes devraient écrire ceci et non cela, et plutôt comme ceci, et pas comme cela. Il y eut ensuite cette table ronde sur la place des femmes dans le milieu théâtral, où l’on s’est étonné, voire scandalisé, de ne pas nous voir, mes compagnes de galère et moi, taper du poing sur la table et brandir des banderoles pour dénoncer vigoureusement l’hétéropatriarcat et réclamer le pouvoir. Comme si « féministe » rimait avec « cri », avec « exclusion », avec « interdit de dire ». Enfin, il y a eu ces reproches sur plusieurs de mes textes, dans lesquels les héroïnes ne se respectent pas, se vautrent, échouent. « Ca, ce n’est pas féministe », m'a-t-on dit. Quand ce n'est pas : « Ca, c’est antiféministe. » (Sans se demander quel rôle le contexte sociopolitique dans lequel elles évoluent pouvait jouer dans l'histoire, soit dit en passant.) [...] Pour moi, à ce jour, être autrice et féministe, c'est revendiquer le droit à l'écriture libre.
(Pauline Peyrade)