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Citation de enkidu_


Ces monuments ont été écrits, ou dessinés, ou sculptés, sur le « Toit du Monde », berceau unique de l’humanité, à l’aide de signes que toute l’humanité comprenait, avant qu’elle se fût divisée par des migrations diverses, et qu’elle eût ainsi perdu la conscience de sa totalité. Ce qu’est cette écriture unique, on ne le saura sans doute jamais qu’à l’aide d’approximatives appréciations ; car un paléographe ne reconstruira pas une écriture au moyen d’un jambage, comme Cuvier reconstruisait un mammouth au moyen d’une jambe. Mais c’est de cette écriture unique que découlent, à des époques concordantes, et par des procédés de déformations parallèles, les hiérogrammes Chinois et les hiéroglyphes Chaldéens (ou suméro-acadiens). Il est possible toutefois de déterminer les influences, toutes physiques, qui présidèrent à ces déformations.

Sur ce Pamir, qui fut notre commun berceau, une même langue, une même graphie, toutes deux perdues, régnaient. Un jour, soit qu’un cataclysme ait amené sur ces altitudes le froid qui y règne aujourd’hui, soit que, à force de se pencher sur le bord rugueux des plateaux, la race humaine ait pris le vertige des plaines inconnues, un jour vint où les hommes, par les fleuves qui prenaient naissance aux plateaux primitifs, descendirent aux niveaux inférieurs. Ainsi ceux du Sud, les futurs Rouges, par le Dzangbo et le Sindh, ainsi ceux de l’Ouest, les futurs Blancs, par le Syr et l’Amou, ainsi ceux de l’Est, les futurs Jaunes, par le Hoangho et le Yangtzé, tous, sans regarder en arrière, quittèrent la montagne ancestrale qui fut le nombril du monde. Parmi eux, les vieillards et les savants emportèrent la Sagesse et la Tradition.

Or, sur les rives fertiles des fleuves, sous le bénévole et chaud soleil de l’Extrême-Orient, les peuples de l’Est, policés peu à peu, trouvèrent le bac-chi (cay gio, phaong-moc), des fibres duquel ils tirèrent un papier fin, souple, et des pinceaux plus doux que la soie, merveilleux instruments entre leurs doigts agiles d’ouvriers artistes. Par ces moyens subtils de transmission, les linéaments primitifs prirent la figure de dessins agrémentés de pleins et de déliés, sous la légèreté du pinceau et l’habileté de la main.

Or, dans les espaces tortueux qui s’étendent à l’ouest des Thianshan, sous le soleil dévorant des Mésopotamies, les peuples trouvèrent à la surface du sol les granits, les diorites, les marbres, les pierres brillantes et dures, qui, amoncelées en remparts, assirent sur des bases presque indestructibles les monuments de la puissance et de la science Chaldéennes. Alors, saisissant le marteau, les peuples de cet Orient taillèrent, à l’aide de pointes d’acier, les caractères primitifs, qui, s’enlevant au ciseau sur la surface des marbres, s’étoilèrent en triangles aigus, et s’allongèrent en lignes rigides.

Bientôt ces différences, dues seulement d’abord aux difficultés graphiques rencontrées dans la nature, entrèrent dans l’essence des hiéroglyphes, et constituèrent, par les déformations successives des caractères, au fur et à mesure des civilisations divergentes, des écritures dissemblables. Mais malgré tout, le caractère essentiel des représentations demeure le même ; l’esprit d’un synthétique reconstitue le type primitif, et découvre, sous le voile des plus diverses apparences, le même signe hiéroglyphique, lumineux et triomphant. (chapitre II)
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