Quant à la liberté, je n'y reviens pas : c'est le but vers lequel nous marchons. Il s’agit de l’assurer à tous. Contre les abus de la force et de l’autorité, 1789 a dit: liberté ! et il fallait le dire ; mais 1789 n'a pu songer à garantir la liberté contre les périls inconnus alors, contre l'extraordinaire puissance de l’accumulation des capitaux, multipliée encore par le progrès incessant de la science. La liberté, telle que la définissent les théoriciens de l’économie politique pure, c'est tout simplement ce que nos ancêtres appelaient la force; c’est celle qui permet à un milliardaire de tenir entre ses mains les conditions de production et de vente d’un objet déterminé dans un pays entier, si bien que chacun des consommateurs soit forcé d’en passer par ses exigences draconiennes. Qu'est la liberté des pauvres gens devant cette liberté prétendue du chef d’un trust? Cette liberté qui disparaît ainsi devant les abus de la force économique, mais c'est la servitude! Le trust, c’est du collectivisme au profit d'un seul. À ce compte, J'aimerais mieux l’autre, qui est au profit de tout le monde.
De nos jours, le mot solidarité a pris un sens nouveau, précis, profond même. Et c’est de celui-là qu'il va s'agir. — Évitons d’abord les malentendus.
Le mot a une première signification, objective, scientifique. Il exprime la notion d’un fait, les relations d’interdépendance entre certains phénomènes d'ordre physique, intellectuel ou moral. C’est avec cette acception qu'il est passé dans le langage de la science.