N'oubliez donc jamais sa douce présence, comme font, hélas ! la plupart des hommes. Parlez-lui le plus souvent que vous pouvez : il n'en marquera ni ennui, ni dédain, à la façon des grands seigneurs. Si vous l'aimez, vous trouverez toujours que lui dire. Parlez-lui de tout ce qui vous est à cœur, de vous- même, de vos intérêts, comme vous en parleriez à un ami dévoué. N'allez pas le tenir pour un souverain altier qui ne consent à traiter qu’avec des personnages importants et d'affaires importantes. Notre Dieu, lui, se plaît à descendre jusqu'à nous, et jouit de ce que nous le mettions au courant, dans le détail, de nos occupations les plus banales, les moins relevées. Il vous aime et il a soin de vous, comme s'il n'avait à penser qu'à vous seul. Vos intérêts retiennent toute son attention : c'est au point, dirait-on, qu'il n'emploie sa providence qu'à vous secourir, sa toute-puissance qu'à vous aider, sa miséricorde et sa bonté qu'à vous porter compassion, à vous faire du bien, et à gagner par ses délicates prévenances votre confiance et votre amour.
A considérer la préoccupation qu'a notre grand Dieu de faire du bien aux hommes, à ne découvrir dans son Cœur divin de soin plus pressant que d'aimer les hommes et de s'en faire aimer, le saint homme Job était dans la stupeur. « Seigneur, s’écriait-il, qu'est-ce que l’homme pour que Vous fassiez de lui si grand cas ? ou pourquoi votre cœur est-il en souci de lui ? » (Job 7, 17.)
Voilà qui nous fait comprendre quelle erreur c'est de penser qu'il y ait manque de respect envers la Majesté divine à mettre, dans nos relations avec Dieu, de l'abandon et de la familiarité.
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Il est majesté infinie, mais en même temps infinie bonté et amour sans mesure. Vous trouvez en Dieu la plus haute Souveraineté qui se puisse concevoir ; mais vous rencontrez aussi, en lui, l'Ami le plus affectueusement attaché que vous puissiez avoir.
Les uns, dit saint François de Sales, font consister la perfection dans l'austérité ; les autres, dans la prière ; ceux-ci, dans la fréquentation des Sacrements ; ceux-là, dans les aumônes. Mais ils se trompent tous : la perfection consiste à aimer Dieu de tout son coeur.
Prenez l'habitude de vous entretenir seul à seul avec Dieu, familièrement, avec confiance et amour, comme avec l'ami le plus cher que vous ayez, et le plus affectueux. C'est une grande erreur, nous l'avons vu, de mettre de la défiance dans nos rapports avec Dieu, de ne vouloir jamais paraître en sa présence que comme un esclave timide et honteux, tout tremblant d'épouvante devant son Maître.