André Moret

Dans le Sud de l'Allemagne, vit un paysan nommé Helmbrecht ; il a un fils et une fille. Le fils veut mener une vie plus aisée que son père. ce dernier cherche en vain à l'en dissuader, ses avertissements demeurent sans effet. Il se résout alors à accomplir la volonté de son fils. Il lui achète un cheval et, après avoir inutilement renouvelé ses exhortations et ses conseils pressants, (...) après lui avoir conté sans succès quatre rêves prémonitoires qui semblent annoncer à son fils une mort tragique, il est obligé de laisser partir le jeune orgueilleux.
Celui-ci se rend à une prétendue cour, qui est en réalité le repaire d'une bande de " Raubritter ", plus brigands que chevaliers, dont il devient l'un des membres les plus redoutables. Voler, piller, rançonner et torturer les vilains, tels sont ses glorieux exploits. Il a pour compagnons neuf dignes chevaliers, porteurs de noms bien symboliques, qui passent leur temps à boire ou à semer autour d'eux la terreur.
Un jour, il revient plein d'arrogance, à la maison paternelle et y séjourne une semaine. Il traite ses parents avec mépris, mais, ayant ébloui sa soeur Goteldinde et l'ayant conquise à ses idées, il persuade de venir le rejoindre parmi ses compagnons, dont l'un deux, en l'épousant, assurera son bonheur parfait. Le mariage est en effet célébré ; mais au milieu de la fête, surgissent le prévôt et les sbires. Les brigands sont arrêtés, neuf d'entre eux sont pendus haut et court. Helmbrecht est laissé en vie, mais atrocement mutilé à titre d'exemple. Il se traîne jusqu'à la maison de son père, qui le chasse impitoyablement, et finit par tomber aux mains de paysans qui furent autrefois ses victimes. Pleins de haine, ceux-ci se précipitent sur lui, l'accablent de coups et le pendent.
Ainsi s'accomplit la prédiction du vieil Helmbrecht et se termine le premier villageois de la littérature allemande, un des plus poignants aussi et des plus sobrement tragiques.

Helmbrecht le fermier

Ta mère sait préparer d'ordinaire une excellente bouillie ; que ton bec s'en régale, plutôt que de donner un cheval volé en échange d'une oie. si tu observais, fils, cette coutume, tu vivrais honnêtement partout où tu irais. Mon fils, mêle ton seigle d'avoine, plutôt que de manger malhonnêtement du poisson, voilà le précepte de ton père.

Helmbrecht le fermier

L'un décrit ce qu'il a vu, un second narre ses propres aventures ; un troisième parle d'amour, un quatrième de profit, un cinquième de fortune, un sixième d'exploits magnanimes. Je veux , moi, vous raconter ici ce ce qui m'est arrivé et ce que j'ai vu de mes yeux. J'ai vu, je vous l'affirme en toute certitude, un fils de paysan dont la chevelure était blonde et bouclée et lui flottait sur les épaules de toute sa longueur. (...)
Voulez-vous maintenant ouir ce qu'il en est ?

Helmbrecht le fermier

Fiers et nobles jouvenceaux, en vérité je vais vous parler sans fiction d'un chevalier de bonne éducation et de ce qui lui advint pour finir ; il lutta sans cesse pour l'honneur, et eut de ce fait à souffrir grands tourments.

Pierre de Staufenberg

Ecoutez, enfants, mon avertissement: qui veut acquérir renommée avec les chevaliers ou les écuyers dans les combats et les tournois doit risquer partout sa vie.

Pierre de Staufenberg

Croyez que ce récit n'est pas un mensonge et que je ne parle point par fiction.

Helmbrecht le fermier