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Citation de Partemps


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Partons du titre que vous avez donné à ce nouveau livre, André du
Bouchet, Peinture. Titre (au) singulier.

Il se peut que la dimension métaphorique de ce mot soit rendue
sensible par le fait que très peu de peintres ou de peintures sont
mentionnés dans ce livre. Il m’arrive même de dire plusieurs fois
que la peinture n’a jamais existé. Proposition insoutenable, difficile à
débattre, qui signifie que tout est peinture… Nous sommes à chaque
moment de notre existence engagés dans un monde de représentations
sur lesquelles nous nous appuyons, comme dans le langage nous
nous appuyons sur les mots, mais il s’agit de représentations qui
ne sont pas l’objet de notre vie, le but que nous nous donnons: la
représentation est sans cesse à traverser. Et dans mon rapport avec
les peintures, je me suis souvent aperçu que, quand une peinture me
touche, je ne m’y attarde pas; elle est l’amorce d’une accélération de
temps qui m’incite à tourner très rapidement le dos à la peinture et
à m’engager dans la lumière de l’espace qu’elle m’a ouvert. Au fond,
quand je me suis risqué, sans très bien comprendre ce que je disais,
à avancer que la peinture n’a jamais existé, je voulais dire que la
peinture n’a pas de place circonscrite dans mon existence en tant que
catégorie close, cadrée: en tant qu’objet d’art… Tout est peinture…
Le rapport que l’on peut avoir avec le monde est peinture, dans le
sens d’une apparition, d’une représentation et de l’annulation de cette
représentation que l’on traverse pour être. Mais ce point d’être, de
présence, on ne le soutient que par intermittence: il est trop fort pour
être soutenu continûment… Il ne faut pas que les peintures – ou la
peinture – se substituent à ce rapport d’existence. Et c’est là, je pense,
e contresens de l’art, de la poésie ou du livre. On prend un livre, on
regarde un tableau pour atténuer notre rapport au monde, à l’être, à
la présence; c’est une sorte d’écran protecteur second destiné à nous
rassurer. Or il ne s’agit pas d’atténuer, mais d’aviver, donc de traverser
la peinture, la page… Il s’agit, par le mot, d’être en rapport un instant
avec ce qui est en dehors du mot ou, dans la peinture, avec quelque
chose qui n’est pas de l’ordre du tableau.
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