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Citation de Charybde2


Il alluma la télévision et se servit un whisky avec des glaçons qu’il fit machinalement tinter en regardant, sans les voir, deux jeunes femmes qui donnaient des cours de cuisine indienne. Juste au-dessus de la porte, une lucarne rectangulaire montrait le haut de la colline qui surplombait le lac. Le bleu-noir de la montagne fut traversé par un lent faisceau de lumière : une auto ? Il n’y avait pas de route carrossable là-haut. Un gosse sur une moto de cross ? Crane partit un peu avant minuit, avec, dans un petit sac à dos, la bouteille de whisky, une paire de jumelles, une lampe torche et sa couverture bleue. Il monta jusqu’au chemin du phare. Des agneaux, le cul jaune, bêlaient.
Le phare, la falaise ? La falaise l’emporta. Du sommet on verrait mieux venir les forces ennemies. Au phare, malgré l’heure tardive, il craignait de rencontrer Katie ou les locataires, sortis regarder les étoiles et fumer. Il faudrait leur parler : lui, Crane, n’avait plus rien à dire. Mieux encore, en descendant au lac, les cuisses douloureuses, il dut se rendre compte obscurément qu’il avait perdu jusqu’à sa voix intérieure, laquelle, fabrique à digressions, lui avait pourtant tenu compagnie depuis l’enfance. De l’autre côté du lac, la pente était rude. Il glissa dans un trou d’eau et se releva, trempé jusqu’aux genoux. S’il avait fait plein jour et grand soleil, il se serait déshabillté et se serait enduit le visage et le torse de boue – la nuit était fraîche et il n’y avait plus place dans son esprit pour ces jeux enfantins. (« Au pied du phare »)
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