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Citation de Charybde2


Cette dichotomie entre le fantasme et le trivial, l’esprit et l’engrenage – où l’esprit est la représentation d’un idéal personnel et l’engrenage l’incarnation des systèmes oppressifs qui soumettent l’individu – jalonne la filmographie du Hollandais violent. Dans Starship Troopers, Johnny Rico (Casper Van Dien) rêve d’une vie de « citoyen » jusqu’au jour de son inscription, où il est brutalement confronté aux moignons du sergent recruteur, qui le félicite de prendre le même chemin que lui. Dans Le Quatrième Homme, la conférence guindée de l’écrivain reconnu, toute en formules pompeuses et assertions sérieuses, contraste avec le désordre qui règne dans son appartement d’alcoolique. Dans Hollow Man, Sebastian Caine (Kevin Bacon) se rend rapidement compte que son invisibilité est plus handicapante qu’excitante, et qu’elle est même finalement assez lassante. Avec cette méthode de brusque retour à la réalité, Paul Verhoeven fuit un idéalisme au rabais selon lequel l’absolu rêvé par ses personnages (le statut de « citoyen », la figure du savant, l’intrépidité du motard, l’invisibilité…) s’affirme comme un moyen de fuir la fatalité de l’engrenage (le statut de civil, l’alcoolisme, la mécanique…).
Le Hollandais, en éternel intranquille et incorrigible réaliste, préfère remettre ces absolus en question pour finalement renvoyer dos à dos ambitions personnelles et normes oppressives. Mais, loin de se suffire à elle-même, cette opposition permet à Verhoeven d’articuler un discours complexe sur l’individu : c’est en filmant la longue lutte de l’homme pour sa liberté – une lutte par laquelle il s’affranchit de l’aliénation, mais aussi, via un ancrage dans un réalisme lucide, des fantasmes inatteignables – que Verhoeven compose une peinture acide et désespérée de la condition humaine. De l’entreprise toute puissante (RoboCop) à la société totalitaire (Total Recall), du patriarcat (Business is Business) à l’illusion du collectivisme (La Chair et le Sang) et au despotisme éclairé (Hollow Man), Verhoeven décortique les systèmes les plus variés pour se poser la question de la survie de l’individu dans le monde, ainsi que des compromis et des défaites qui le corrompent un peu plus. (Benoît Marchisio)
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