Je m'appelle Bertrand, je suis un enfant de la guerre. Maman m'écrit et raconte à l'encre bleue ce dimanche de plein soleil sur la route de Poitiers à Bordeaux. Elle me serre dans ses bras, très fort, et se jette dans un fossé d'herbes sèches, sous la mitraille d'un bombardier italien. Lui, c'est Lucchino d'Arrezzo, capitaine de l'aviation italienne. (...) Cinquante ans plus tard, quelle main mystérieuse nous a poussés l'un vert l'autre ? Lui, le portier d'un petit hôtel, moi, le critique de la musique des autres... au bal masqué du hasard, dans cette Venise figée dans la glace, frémissante sous les giboulées d'un hiver de carnaval.