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Citation de Raffaello


Le Bühlerhöhe somnolait paisiblement sous le soleil matinal de ce début d’été lorsque, au terme de sa tournée d’inspection, Mme Reisacher envoya le vieux domestique Lepold chercher la grosse Emma. Il se savait porteur d’une mauvaise nouvelle, aussi traîna-t-il les pieds encore plus que d’habitude en traversant le vestibule de marbre pour rejoindre l’aile des cuisines où se trouvait le cagibi de la femme de chambre. Emma se sentit défaillir. Elle avait beau faire deux têtes de plus que la Reisacher, sa crainte du purgatoire n’était rien à côté de celle que lui inspiraient les humeurs de son autoritaire patronne. La tête basse, les mains moites, elle frappa quelques instants plus tard à la porte du bureau, derrière la réception.
Deux serviettes non remplacées, un petit savon qui manquait sur le lavabo de la chambre 107 – un hôtel de première classe* 1 nécessitait un personnel à l’avenant, surtout maintenant que le chancelier allait venir. Voix basse mais tranchante de la Reisacher. Emma avait peine à la comprendre tant cette voix lui faisait mal. Toute tremblante, elle s’aperçut que les larmes lui montaient aux yeux.
— Arrête de pleurnicher, rassemble tes affaires et pars sans faire d’histoires, sinon je te supprime ta paie des quinze derniers jours, siffla la gouvernante.
Elle chassa Emma et referma la porte derrière elle.
Elle considérait les femmes de chambre comme une source inépuisable de contrariété et se jura une fois encore d’être plus exigeante à l’avenir. Malheureusement, il était difficile de trouver du personnel pour un hôtel aussi isolé. Alentour, la Forêt-Noire n’avait pas mieux à offrir que des rustaudes qui dormaient pour ainsi dire avec le bœuf et l’âne dans leurs fermes. À Strasbourg, c’était tout autre chose ! Cependant Strasbourg était redevenue française, la circulation frontalière n’était pas encore rétablie, et il fallait juste espérer que la prochaine Emma serait un peu moins plouc et un peu plus futée.
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