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Citation de celinerousselot


extrait non corrigé :
Chapitre 1

J'étais arrivée sur le tarmac de l'aéroport international John Fitzgerald Kennedy en fin de matinée et il faisait très froid. La neige tombait à gros flocons.
Avant de me rendre chez l’ami d' Aaron, j’étais allée sur Liberty Island au sud de Manhattan. Je voulais voir la Statue de la Liberté. Malgré le vent et la neige elle se tenait fière et droite. À l'image du courage dont j’allais devoir faire preuve pour commencer ma nouvelle vie. Elle était impressionnante. Après l’avoir observée un long moment, je pris mon courage à deux mains et je fis signe à un taxi pour aller au centre de la ville.
En voyant mon visage le chauffeur ne me demanda rien d’autre que l’adresse où je voulais me rendre. Il n’essaya pas de me faire parler, voyant que je pleurais déjà. Si je n’avais pas été dans un tel état émotionnel, il aurait très certainement aimé me faire sa visite touristique pour que je profite de la vue des grands magasins arborant encore leur décoration de Noël. Mais il eut le bon sens de ne pas le faire. Il me déposa devant un très vieux Pub animé.
En entrant dans le McSorley’s Old Ale House, j’eus l'impression, en franchissant les portes d'avoir utiliser une machine à remonter le temps. L'intérieur était tout en bois, des tables et des chaises identiques à celles que le bar offrait au dix-neuvième siècle et des photos sur les murs datant du début du vingtième siècle conféraient à ce lieu une atmosphère particulière dans une des villes les plus modernes du monde.
Les deux devises du Pub étaient affichées à l’intérieur : la première ‟ Soyez bon ou partez ”. Une mise en garde que je compris tout de suite. L’endroit semblait protégé par une barrière ne laissant entrer que des personnes à l’âme pure... La seconde, ‟ Nous étions là avant votre naissance ”. J’y voyais un clin d’œil à ma véritable nature. Je savais que je n’étais pas la seule. Mais je ne m’étais pas demandée où m’envoyait Aaron avant de lire cette phrase. Ces devises agissaient comme des talismans, des fourmillements me parcouraient le corps un instant.Je savais au fond de moi que le sort tentait de déceler mes intentions et ma nature profonde. C'était une sensation étrange, à la fois désagréable et troublante. Lorsque cela s'arrêta sans que j'en éprouve la moindre douleur, je sus que je pouvais m'aventurer dans l'établissement sans crainte. même si je trouvais étonnant, après la façon dont Aaron était mort, que je puisse y rester.
Le doute n’est pas permis, au moins je sais où je mets les pieds maintenant.
En m'installant dans un coin, j’aperçus des clients commander une bière et que le serveur leur apportait deux choppes. C'était étonnant mais après un moment d’observation, j'ai compris qu’il s’agissait d'une pratique habituelle en ce lieu. La bière était très mousseuse et pour ne pas spolier les client sur la quantité on leur versait deux verres. J’appris, en entendant une touriste lire son guide à haute voix, que ce Pub était l’un des plus vieux pub irlandais de New York, il avait reçu la visite de personnages illustres comme Abraham Lincoln, Théodore Roosevelt, le célèbre magicien Harry Houdini, le poète E. E. Cummings ou le romancier Gilbert Sorrentino. Les photos au mur retraçaient toutes ces vies passées, toute cette histoire... L’ambiance me plaisait. J’avais l'impression d’être à une autre époque.
Le patron du Pub, que je repérais rapidement parmi les employés de l’établissement, semblait être un irlandais taciturne, entre trente et quarante ans. C’était le genre d'homme dont le regard exprimait beaucoup de choses et au travers duquel on lisait une trop longue expérience de la vie ce qui était en contradiction avec son âge puisqu'il ne devait pas avoir plus de trente neuf ans.
Les clients qui essayaient de le faire parler, réussirent à lui faire raconter de belles histoires sur son établissement. Si je n'avais pas eu conscience de sa particularité, je me serais posée des questions. Comment pouvait-il connaître toutes ces anecdotes sur l’histoire de son établissement ? Mais voilà, je savais qu’il les avait vécues. Il était très attaché à ce pub et tout ce qui s’y était passé. Après tout, il l’avait créé et en était le propriétaire depuis toujours. Il utilisait très probablement la même technique qu’Aaron pour hériter de lui-même. Un bon coffre à la banque, un titre de propriété qu’il se léguait d'une vie à l’autre... et un gérant pour s’occuper des affaires quand il ne pouvait pas le faire...
Le patron avait eu un regard dans ma direction à mon arrivée. Il avait aperçu mon air étonné devant sa barrière de protection. J'avais donc été repérée aussitôt.
Pour la discrétion, on repassera.
Malgré tout, il s'occupa longuement de ses clients. Il observait de temps à autre mon comportement. Je m’étais installée à une table dans un coin. Il savait que je venais pour lui. Il aurait été étonnant en connaissant le nombre de pub irlandais que comptait la ville de New York de tomber par hasard sur celui dirigé par un ‟ esprit ancien ”.
J’aurais dû tenter d’améliorer mon apparence. Je ressemblais à un chat apeuré, trempé par la neige, mais je n’en avais pas la force. Après un moment, alors que le Pub commençait à se vider un peu, il déposa une assiette devant moi sans rien me demander. Voyant que je n’oserais pas parler la première, il s’assit face à moi et inclina la tête sur le côté. Après cinq longues minutes, je n’avais toujours pas prononcé un seul mot. Je tremblais comme une feuille malgré le chauffage. Cela faisait moins de 24h qu'Aaron était mort... Je me demandais si je serais a nouveau capable de m’exprimer un jour.
‟ Prends ton temps et mange. J’ai l'impression que tu n’as rien mangé depuis un moment. Il y a une chambre au-dessus du Pub qui est libre. Tu pourras t’y reposer cette nuit et on discutera demain si tu ne peux pas le faire avant. ”
Il m’ouvrait sa maison, sans rien me demander. À moi, celle qui étais responsable de la mort de son ami. Certes, il n’était pas au courant, mais cela ne m’empêchait pas de culpabiliser.
Je lui en serais éternellement reconnaissante. [...]
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