Eric Montbel

La cabrette, histoire et technique d’une cornemuse



André Ricros directeur de l’Agence des musiques des territoires d’Auvergne (AMTA) est l’auteur de ce livre de plus de 800 pages, véritable encyclopédie sur la cabrette. Une pléiade de collaborateurs qualifiés a participé à cette somme dont Didier Perre. La cabrette contrairement aux idées reçues ne relève pas des bardes celtes, mais apparaît seulement au premier tiers du XIXe siècle. Lire ce livre c’est à la fois explorer le Massif central du Bourbonnais au Tarn en passant par l’Italie et la cour d’Henri III. Au fil des chapitres on découvre comment des romantiques, comme George Sand, ont réussi à donner à la cornemuse jouée par des paysans un passé mythique champêtre qui n’a jamais existé. C’était une tradition héritée de L’Astrée et des bergers et bergères de cour.



Une documentation iconographique gigantesque, venant des quatre coins du monde, (plus de 1200 images de dessins, croquis, vieux clichés photographiques, cartographie) correspond rigoureusement au texte. La peinture conduit, entre autre, le regard de Guy François ou Onslow à une vue inconnue du Puy au rocher sans statue. Des notes techniques historiques et anecdotiques accompagnent l’illustration.



Après la Révolution des facteurs de cour se sont adaptés à la demande provinciale et populaire puis des luthiers de Paris et du Massif central ont perfectionné, sur près de deux siècles, cette cabrette dont l'originalité réside dans sa richesse harmonique. Elle s’est adaptée, comme la bourrée, aux contraintes des murs. Si dansée dans la nature, la bourrée pouvait étendre sans fin son double front d’homme et de femme, en revanche aux Auvergnats de Paris, dans les estaminets du quartier au-delà de la Bastille, la contrainte des murs s’imposait tant aux danseurs qu’à l’instrument. La cabrette cimente l’unité de la colonie auvergnate de Paris autour d’une même sonorité et dans un échange fructueux entre la capitale et la province.



Œuvre de Didier Perre deux chapitres traitent l’un : « Les éléments de vocabulaire » où ce spécialiste de l’occitan évoque la cabrette « petite chèvre » et constate, avec l’Atlas linguistique de Pierre Nauton que le nom patois de l’instrument ne se superpose pas sur celui de l’animal ; dans l’autre « Un des territoires de la cabrette la Haute-Loire », il restitue la place de notre département dans ce concert régional : musiciens et fabricants et ce à partir de témoignages, enquêtes de terrain, photos de noces et de conscrits depuis la chevrette sur le Plô lors de la venue au Puy de François Ier.



Après avoir lu ce livre, si dans votre enfance vous avez fabriqué des sifflets avec un bois de sureau, puis appris à tourner sur bois, avec une bonne oreille, vous êtes mûr pour réaliser votre cabrette !