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Citation de alzaia


L'entrée d'une caverne plus vaste qu'une église apparaît à ma vue. Le chant des oiseaux ne pénètre ici qu'assourdi : j'ai quitté l'air chaud des bois, et me trouve en présence, soudain, du curieux silence et du froid des profondeurs de la roche. La voûte est à quinze mètres au moins. Une immense grotte avec, ça et là, de lourdes pierres tombées sur le sol sablonneux, à plat; des blocs de pierre ressemblant à des tables de géants, à des sièges, à croire que je suis attendu. je fais quelques pas dans un total ravissement, un étonnement sans borne; j'étais certain de l'existence d'une grande caverne sous le château de Domme, mais je ne pensais pas découvrir une grotte aux dimensions cyclopéennes; cette grotte, c'est l'Europe mystérieuse et secrète; c'est le Monde souterrain, sacré, hanté, où il me faut me réfugier.
Un couloir s'enfonce plus avant dans la pierre. Je m'y engage en rampant. Le couloir aboutit à une chambre obscure, au sol de sable très fin, très froid; et je m'y repose, immobile, couché sur le dos, dans une totale obscurité, dans un silence effrayant et dans une nuit de tombe. Le plafond est si bas que, tout étendu que je suis, je peux le toucher de la main. Au coeur de la pierre, dans cette obscurité, je ne vois pas mon corps; et, de moments en moments, dans cette nuit sans étoile, il me devient étranger. Qui plus est, j'ai perdu toute notion de l'Espace et du temps; et, depuis un instant, je ressens l'influx du "grand cristal". Immédiatement perceptible.
Les infinis couloirs à cristallisation sont là, tout proches. L'influx, ici d'une rare intensité, s'empare délicieusement de mon âme dans sa totalité; mon corps oublié, je ne suis plus qu'un esprit dans cette "chambre royale", un esprit vaste, heureux, isolé du monde, libéré de toute entrave. Le temps et l'espace détruits à cette profondeur et dans cette nuit, je suis moi-même enfin, au dimensions de l'Univers, un géant couché dans sa chambre de pierre. Et "je vois"! Venues de tous les temps possibles, de multiples images passent devant mes yeux grands ouverts dans le noir. Une masse incroyable de connaissances, d'appels, de fulgurantes lueurs ! Puis, sous l'influx du "grand cristal" qui va grandissant, les images s'effacent, et je passe soudain dans un état d'absence heureuse.
Ma conscience existe encore, intacte, mais désintéressé de ce qui n'est pas sa joie de ressentir l'immense influx qui lui vient de la roche. Plongé dans une sorte de mort, j'ai le sentiment de flotter à un mètre au-dessus de mon corps étendu sur le sable glacé, au plus noir de la pierre. Les images réapparaissent, très nettes, intensément colorées, de très anciens souvenirs. Je revois une caverne marine, un long séjour sous la mer, infini, jusqu'à n'être plus qu'un délicieux oubli du temps. Oui, j'ai connu cela; je me souviens du lent balancement des houles entendu pendant des millénaires dans une grotte lavée par les flots où j'ai vécu d'une vie divine, heureuse. Il s'efface... le souvenir de la caverne marine ! Je reconnais maintenant une antique odeur de pierre sèche : j'en suis certain, entre plusieurs existences, très loin dans le passé, j'ai vécu dans des tombes, l'âme heureuse et à demi consciente, mon corps abandonné à un très pur sommeil.
Cette fois-ci, quand je rentre en mon corps, il me faut un long moment pour savoir où je suis, pour me souvenir de mon état présent, sur cette planète, dans cette chambre de pierre : c'est le vieil étonnement, l'instant d'hésitation, la perte de toute mémoire, bientôt suivie de la joie de renaître.
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