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Citation de Partemps


François Boddaert
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Pour ce qui regarde maintenant le sort contemporain fait à la poésie, ce que Michel Deguy appelle « résilience » dans sa contribution au problème, je crois devoir dire, comme poète (un peu) et comme éditeur (beaucoup), qu’il tient à quatre facteurs non négligeables :

1/ Une concurrence loyale avec le roman (c’est dit). Mais outre qu’il existe des romanciers poètes et des poètes romanciers, aucun édit n’interdit de lire roman et poésie, concomitamment s’il se peut.

2/ L’impéritie de l’Éducation nationale. Laquelle a à voir avoir un autre fantasme des poètes qui ne se vivent plus comme des « éducateurs » du goût et de la pensée. On ajoutera là la lancinante et taraudante question suivante : la poésie pense-t-elle ou donne-t-elle à penser ?….

3/ La maigre fortune traditionnelle de la chose poétique dans l’horizon français, qui ne saurait être tenu pour planétaire puisqu’il est des pays circonvoisins (je pense à l‘Italie) où un poète actif qui ne se prend pas – et n’est pas - Dante ou Leopardi — peut raisonnablement espérer vendre 10 000 exemplaires d’un livre nouveau. Chez nous, même en retirant un zéro, on atteint rarement cet empyrée. Et ça n’est pas nouveau car, sauf avis contraire, le grand gagnant du Loto éditorial en matière de poésie, reste toujours Lamartine et ses Méditations qui vendra près de 30 000 exemplaires des neufs éditions imprimées sur deux ans. Et encore dût-il son succès au parti catholico-royaliste qui crut alors tenir là son chantre ! Anecdote qui donne postérieurement raison à Huet qui, nous l’avons vu, pensait que la poésie doit, entre autre chose, aboucher à la politique !

4/ Le piètre niveau de la critique, puisqu’il n’est quasiment plus un journal sérieux qui publie des poèmes ou même parle vraiment des livres de poésie. Quant à la télévision… Sur ce point, l’éclaircie viendra peut-être de l’Internet, mais pour l’heure, ce média est assez anarchique et profus pour qu’il soit risqué d’y aller d’une certitude.
J’ajoute subrepticement ceci : à force de pleurer son effacement, le poète court le risque d’être pris au sérieux – pour une fois !
Il n’en reste pas moins que les poètes existent toujours, et nombreux. Que les éditeurs continuent cahin-caha de publier leurs livres. Un détour au fréquenté Marché de la Poésie, en juin à Saint-Sulpice, confirmera les faits.
Grâce aux aides publiques, il sort des imprimeries environ 300 recueils notables par an. Et, quoiqu’on en dise, ces petits volumes trouvent tout de même quelques centaines de lecteurs. Ce qui, rapporté aux siècles passés, confirme la règle !
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