La figure de l’enfant est indéniablement au centre
de ses derniers recueils. Il s'agit de la recherche ténue,
fragile de la présence perdue d'avant-langage,
quête marquée, nourrie de la conscience de notre
achèvement borné, de notre propre complétude.
L’enfant représente une figure de cette présence
sensible au cœur du secret, de cette énigme, de
cette déchirure de vivre.
L'enfant fait sans aucun doute figure de poète,
de sa quête et de sa requête.
Dans son dernier recueil, " l’enfant de la falaise ",
l'enfant ‒ bouche de terre ‒ est à la fois figure du
poète, expérience même du poème.
" l’enfant
bouche de terre
à l’intérieur de moi
" l’enfance n’est pas un refuge
mais elle desserre la corde étranglée du soir sur la ville
avec la nuit les mots à force d’essayer tissages incertains
béances abandons
dénouent le chant
" retrouver le goût de la terre
sous la langue les ongles
…
ne pas se laisser séparer
retrouver l’enfant
me lover contre lui dans la terre
comme le vide au creux de ma main
et c’est ma main encore
" je dis falaise et j’entends le souffle de la pierre
je ferme les yeux, elle me respire
" y a-t-il encore, toujours, une enfance au-devant de nous ?
l’enfant peut-il guérir de la douleur d’aimer ?
il dessine une plaine qui s’évase et ravit au loin l’image d’une
montagne
les pieds dans l’herbe bleue et l’eau froide fuyante
l’enfant rêve une errance
parfois les mots s’effondrent et le monde vacille
et la cité de verre, de fer, de béton, de fumées traverse et
troue le corps de l’enfant déchiré
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