Françoise Gérard

Connaissez-vous le Jokari ? Cette longue élastique attachée à un socle d’un côté possède une petite balle à son autre extrémité. Et il faut taper fort sur cette balle avec une raquette en bois. Ce que j’ai pu jouer à ça quand j’étais petite !

Mais jamais, ô grand jamais, je n’aurais pensé à faire le lien entre cette élastique et la vie. Et pourtant.

Et bien Françoise Gérard a osé cette parabole et ces mots sont touchants, empreints de nostalgie et de réminiscences. Ils sont comme une petite gorgée de bière qui vous fait remonter les souvenirs de la petite enfance dans une ville du Nord, de l’adolescence dans une autre ville. Ou aussi comme des bulles de savon qui s’envolent vers le ciel chargées d’espoir.

C’est une élastique qui se tend mais sans toucher les fenêtres pour ne pas les briser, qui passe du côté obscur de la rue, qui trace des chemins, qui permet de réfléchir...

C’est aussi un jeu pour les solitaires, comme plus tard la lecture et l’écriture le deviendront.



Pour résumer, c’est une jolie façon d’exprimer les mots tus de l’enfance et de faire rebondir le passé. L’écriture est d’une grande sensibilité et exprime parfaitement l’éveil à la vie.

J’ai pris grand plaisir à lire ces quelques pages, à retrouver la fraîcheur de l’enfance, à savourer aussi ses peurs et ses étonnements.

Je remercie Babelio et les éditions La Chambre d’échos pour ce délicieux retour vers le passé.



Quant à moi, il y a bien longtemps que je ne joue plus au Jokari, l’élastique s’est rompue. Et les nœuds que j’essayais maladroitement de nouer n"ont jamais résisté à la frappe...


Lien : http://mespetitesboites.net

D'abord merci à Babelio pour l'envoi...On pourrait appeler ce livre "Chroniques douces amères du Nord" où l'auteur semble s'être inspirée de son enfance pour broder ce petit récit poétique et plein de charme d'antan.

Je l'ai lu en un après midi et j'ai aimé la fin un brin nostalgique...

"Le joueur initial" est un court récit ponctué de souvenirs d'enfance et d'adolescence de l'auteure dans lequel le jokari est remis à l'ordre du jour.

La plume de Françoise Gérard est agréable et ce lien entre temps qui passe et jeu est intéressant.

Si l’univers du l’opéra dans lequel travaille son père intéresse profondément Annie Bailleul, cette petite fille est surtout fascinée par sa mère, penchée sur son ouvrage de couture pendant des heures. Des homophones appris à l’école à la notion de l’enfer suite à la mort de ses grands-parents en passant par le rapport à sa propre identité, ce petit personnage pensif aux deux parents absents (— le père est un comédien acharné qui deviendra comédien raté et alcoolique, la mère se niche dans une résiliation totale qui finira par l’achever), se pose beaucoup de questions auxquelles il devra seul répondre.



Naïf, pénétrant, sensible et parfois très drôle, le récit de Françoise Gérard nous plonge dans ces années d’innocence chorégraphiées par le rythme de géniteurs accidentels. Toutefois, il n’est pas le roman nostalgique d’une époque révolue mais plutôt celui qui questionne l’être humain à différents stades de sa vie, à travers les yeux philosophes d’une enfant. Le parallèle avec Faust (la pièce que répète le père d’Annie) semble évident : le père, artiste frustré de ne pas être reconnu serait un Faust moderne tandis que la mère deviendrait Wagner, le serviteur humain de ce dernier, dénué de tout sentiment propre. Entre réflexions linguistiques et références littéraires, le langage — thème récurrent du récit, est à la fois une fascination pour Annie comme le point faible de ses parents, vouant la famille à un silence destructeur. C’est finalement un récit sobre mais très juste d'un amour maternel face à la solitude enfantine.