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Citation de Princessemandchoue


Depuis que, enfant chez ma tante Rose, je découvris si péniblement une horreur dont nul n’aurait pu me consoler, je vis dans le monde des autres. Je m’y écorche les mains, les pieds. Je le regarde avec intérêt. Il me plaît, souvent. Je l’aime, bien sûr ; il me rend curieux. Mais tout en lui m’apparaît si autrement fait, conçu pour des visages si différents, que ce que, dans l’enfance, j’aurais, dans tant d’angoisse, rêvé ; que ce que, dans l’adolescence, j’aurais voulu changer ; que ce que, plus tard encore, j’aurais souhaité offrir à mes enfants. J’aurais voulu que, du malheur, nous sachions faire des choses généreuses.

La force de la peur qui n’a cessé de m’étreindre à la vue des cadavres charriés au bulldozer, douloureuse au point qu’elle m’empêcha de vivre, est la même qui, à travers l’amour reçu, régénérescent, me contraint, me supplie de reconnaître le Palestinien pour mien. Revenir dans l’Histoire à ses côtés, ou cesser de prétendre être juif. Ce fut un long chemin, celui de l’étoile que ma mère me fit retirer, cette pièce manquante qui mystérieusement s’était diluée en moi pour prendre forme dans le temps.

Frank Eskenazi, 2013, Une étoile mystérieuse, Paris, Seuil, p. 152-153.
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