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Citation de PATissot


Elle se pencha, passa son bras droit sous les jambes du petit dormeur, son bras gauche sous ses épaules et le souleva précautionneusement du banc de la cuisine.
Katharina était déjà debout et elle avait ouvert la porte du vestibule, dont le froid la fit frissonner.
La grand-mère franchit prudemment le seuil et Katharina ferma la porte de la cuisine derrière elle. En suivant sa grand-mère vers l'escalier, elle effleura de l'épaule une des deux pèlerines toutes mouillées et elle sursauta, c'était comme si quelqu'un tentait de l'agripper ou qu'un animal inconnu l'ait touchée.
Elle se colla aux basques de sa grand-mère, sous les pas de laquelle chaque marche craquait. Quand Katharina posait le pied sur la même marche, elle n'entendait aucun craquement. Elle était trop petite pour faire craquer les marches. Mais un jour, pensa Katharina, chaque marche sur laquelle je mettrai le pied craquera, et chaque maison où je marcherai craquera, les maisons craqueront même rien qu'à me voir approcher. Aucune pèlerine mouillée n'osera essayer de m'attraper. Car je m'appellerai Katharina et je serai quelqu'un.
- Elle dort, la Didi ? demanda une voix de femme par la porte entrouverte.
Elles étaient arrivées à l'étage au-dessus.
- Non, le Kaspar, répondit la grand-mère, tu m'ouvres la porte Kathrin ? Celle-là, ajouta-t-elle en désignant du menton la porte à côté de celle derrière laquelle la voix de femme se faisait entendre.
Katharina se faufila à côté de sa grand-mère et ouvrit la porte de leur chambre. À l'intérieur, il faisait presque encore plus froid que dans l'escalier. À côté d'une armoire de dressait un grand lit avec une large couverture et deux coussins.
- Soulève-moi la couverture, dit la grand-maman, toujours à voix basse, du même ton que si elles partageaient un secret.
Katharina obéit, la grand-mère déposa Kaspar sur le drap de futaine et lui retira son pantalon.
- Nos habits de nuits sont encore en bas, dit Katharina.
- Cela ne fait rien, dit la grand-mère, il peut dormir en chemise.
Elle recouvrit Kaspar, et quand Katharina le vit dormir, elle se réjouit soudain à l'idée d'être dans ce lit. Il était plus grand que celui qu'elle avait à la maison, ou bien n'en avait-il que l'air que parce qu'elle devait partager le sien avec non seulement avec son petit frère, mais encore avec Regula et Jakob ? Elle alla à la fenêtre et regarda dehors, mais dehors les nuages étaient si bas qu'on ne voyait que les arbres les plus proches, derrière lesquels se pressait le gris du néant.
Katharina ressentait quelque fierté à l'idée d'avoir emmené ici son frère toute seule, comme le guide Elmer ses Anglais sur le Hausstock. Dernièrement, il s'était vanté à l'auberge d'avoir escaladé le Hausstock par mauvais temps avec deux Anglais, il avait essayé de les persuader d'attendre que le temps se remette, sinon ils ne verraient rien du tout, mais ces deux-là avaient voulu monter à tout prix, alors ils y étaient allés quand même et ils n'avaient rien vu du tout, il y avait même eu un tel brouillard qu'il s'en était fallu d'un cheveu que lui-même ne se trompât de chemin sur le Meergletscher.
- Viens, Kathrinli, dit la grand-mère à mi-voix. Elle se tenait déjà derrière la porte, la poignée dans la main.
Katharina passa à côté d'elle et s'arrêta devant la porte de la chambre ouverte.
- Adieu, Didi, dit la femme qui se tenait assise sur le bord du lit et qui donnait le sein à son poupon.
- Adieu, tantine, murmura Kathrina, et elle regarda le sein de la femme auquel le bébé tétait les yeux écarquillés. Il était nettement plus grand que le petit de Kleopha qu'elle avait vu avant, et le sein de sa tante était plus gros que celui de Kleopha, qui était déjà gros.
Tantine habitait ici, chez grand-maman, et elle était la femme de tonton. Mais celui-ci n'était tonton que pour Katharina, sinon il s'appelait Paul. Deux autres oncles habitaient encore ici, Johannes et Fridolin. On s'appelait " oncle " ou " tante " quand on était le frère ou la sœur du père ou de la mère.
Katharina ne savait trop quel était exactement le cas de la tantine qui était assise devant elle et qui lui disait maintenant : " Tu es une petite fille courageuse, tu as fait tout le trajet sous la pluie. "
Un sourire éclaira le visage de Katharina.
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