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Citation de enkidu_


La fin du califat et le chiisme. — L'historiographie sunnite accuse parfois le vizir Ibn al-'Alqamî et le théologien Nasîr al-Dîn al-Tûsî, un ismaélien passé à l'imâmisme, d'avoir encouragé le souverain mongol Hûlâgû à marcher sur Bagdad et à renverser le califat sunnite. L'accusation certes ne saurait être retenue sans autres preuves, d'autant que les nombreuses intrigues qui précédèrent la fin du califat abbasside n'ont pas encore livré leurs secrets, à supposer même qu'elles le fassent un jour. Mais elle ne saurait non plus être a priori écartée.

On ne peut, en effet, s'empêcher de remarquer que les conflits entre chiites et sunnites qui avaient si longtemps secoué la grande métropole irakienne et qui, depuis al-Nâsir, avaient eu tendance à disparaître, reprennent, à partir de 640/1248, avec une rare violence. L'année qui précéda la chute de Bagdad fut endeuillée par de nouveaux et sanglants incidents.

On ne saurait non plus manquer d'être frappé par le fait que le chiisme des duodécimains allait bénéficier, sous les Ilkhâns de Perse et d'Irak, des coups que l'invasion mongole porta successivement à l'ismaélisme et au sunnisme. Le chiisme enfin, considéré dans son histoire, apparaît comme une de ces sectes élues qui surent travailler, alternativement ou conjointement, par une action de front ou une tenace infiltration, à construire, sur le plan temporel, cette préséance dont la révélation les avait investies sur celui de l'eschatologie et dont la privation était considérée, par elles, comme une frustration ou une persécution.

La prise de Bagdad par les Mongols. — Le 4 safar 656/le 10 février 1258, en tout état de cause, les Mongols commandés par Hûlâgû, s'emparaient de Bagdad ; ils massacraient le calife et une partie de sa famille et plusieurs docteurs de la Loi, dont les trois fils d'Abû-l-Faraj ibn al-Jauzî. Le nombre des victimes fut certes exagéré par l'historiographie musulmane, mais, de toute évidence, considérable, comme fut grande aussi l'importance des destructions commises par les envahisseurs. Le fatwâ arraché aux docteurs de la Loi et proclamant qu'un infidèle juste valait mieux qu'un imam injuste — fatwâ manifestement dirigé contre le califat abbasside — contribua à arrêter massacres et destructions en donnant, à la conquête mongole, un semblant de légitimation. Mais le rattachement de l'Irak à un nouvel ensemble politique eut, entre autres conséquences, celle de le détacher des pays arabes avec lesquels il avait jusque-là vécu en étroite symbiose. Bagdad perdait, d'autre part, la prééminence religieuse et politique que lui avait value, depuis tant de siècles, le privilège d'être le siège du califat. C'est dans les anciennes provinces arabes du califat, en Syrie et en Égypte, et dans le lointain Maghrib, que le sunnisme allait désormais livrer ses points d'appui les plus solides. (pp. 226-227)
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