AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet

Citation de Partemps


Le cheval de la pensée, dirais-je…
pour emprunter au petit Hans l'objet de sa phobie
…le cheval de la pensée qui s'imagine, un temps, être celui
qui traîne le coche de l'histoire, tout d'un coup se cabre,
devient fou, choit et se livre à ce grand Krawallmachen,
pour nous référer encore au petit Hans qui donne une de ces
images à sa crainte chérie.
C'est bien ce que j'appelle là, le mouvement de hâte,
au mauvais sens du terme, celui du désarroi.
Et c'est bien pour cela que c'est loin d'être ce qui nous
intéresse le plus dans la lignée - la lignée de pensée -
que nous avons épinglée à l'instant, avec tout le monde
d'ailleurs, du terme d'existentialisme.
Aussi bien peut-on remarquer que le dernier venu…
et non des moins grands : Monsieur SARTRE
…s'emploie tout expressément - ce cheval - à le remettre,
non seulement sur ses pieds, mais dans les brancards de l'histoire.
C'est précisément en fonction de cela que Monsieur SARTRE4
s'est beaucoup occupé, beaucoup interrogé sur la fonction du sérieux.
Ιl y a aussi quelqu'un que je n'ai pas mis dans la série,
et puisque j'aborde, simplement, en y touchant à l'entrée,
ce fond de tableau…
les philosophes qui nous observent - sur le point où
nous en venons - [s’interrogent] : les analystes seront-ils
à la hauteur de ce que nous faisons de l'angoisse ?
…il y a HEIDEGGER5
.
Ιl est bien sûr qu'avec l'emploi - que j'ai fait tout à
l'heure - de calembour du mot « jeter », c'est bien de lui,
de sa déréliction originelle que j'étais le plus près.

3 Désarroi : Étymol. et Hist. Av. 1475 désaroy « désordre » (CHASTELLAIN, Chronique, éd. Kervyn de Lettenhove, II, 370, 27); av. 1558 au
fig. « trouble, incertitude »). Déverbal (cf. arroi) de desarreier), déverbal de desreer « dérouter, égarer, mettre en désordre » (ibid.), issu par
substitution de suff. de conreer, v. corroyer.
4 Jean-Paul Sartre, L’être et le néant, Gallimard, Coll. Folio, 1976.
5 Martin Heidegger, Être et temps, Gallimard, 1986. Être et temps, trad. Emmanuel Martineau, hors commerce.
11
« L'être pour la mort », pour l'appeler par son nom, qui est la
voie d'accès par où HEIDEGGER, dans son discours rompu,
nous mène à son interrogation présente et énigmatique sur
l'être de l'étant, je crois, ne passe pas vraiment par l'angoisse.
La référence vécue de la question heideggerienne,
il l'a nommée :
- elle est fondamentale,
- elle est du « tout »,
- elle est de « l'on »,
- elle est de l'omnitude du quotidien humain,
- elle est « le souci ».
Bien sûr, à ce titre elle ne saurait…
pas plus que « le souci » lui-même
…nous être étrangère.
Et puisque j'ai appelé ici deux témoins, SARTRE et HEIDEGGER,
je ne me priverai pas d'en appeler un troisième,
pour autant que je ne le crois pas indigne de représenter
ceux qui sont ici, en train aussi d'observer ce qu'il va
dire, et c'est moi-même :
je veux dire qu'après tout, aux témoignages que j'en ai eus
dans, encore, les heures toutes récentes, de ce que
j'appellerai l'attente…
il n'y a pas que la nôtre
dont je parle en cette occasion
…donc assurément, j'ai eu ces témoignages d’attente.
Mais qu'il me soit arrivé hier soir un travail…
dont j'avais demandé à quelqu'un d'entre vous6
d'avoir
le texte, voire de m'orienter à propos d'une question
que lui-même m'avait posée, travail que je lui avais
dit attendre avant de commencer ici mon discours
…le fait qu'il m'ait été ainsi apporté en quelque sorte
à temps, même si je n'ai pas pu depuis en prendre connaissance…
comme après-tout aussi je viens ici
répondre à temps à votre attente
…est-ce là un mouvement de nature en soi-même à susciter l'angoisse ?
Sans avoir interrogé celui dont il s'agit, je ne le crois
pas quant à moi.

6 André Green : Sur la pensée sauvage.
12
Ma foi, je peux répondre, devant cette attente, pourtant
bien faite pour faire peser sur moi le poids de quelque
chose, que ce n'est pas là…
je crois pouvoir le dire par expérience
…la dimension qui en elle-même fait surgir l'angoisse.
Je dirai même : au contraire, et que cette dernière
référence…
si proche, qu'elle peut vous apparaître problématique
…j'ai tenu à la faire pour vous indiquer comment j'entends
vous mettre…
à ce qui est ma question depuis le début
…à quelle distance la mettre pour vous en parler…
sans la mettre tout de suite dans l'armoire,
sans non plus la laisser à l'état flou
…à quelle distance mettre cette angoisse ?
Eh bien, mon Dieu :
à la distance qui est la bonne, je veux dire celle
qui ne nous met en aucun cas trop près de personne,
à – justement - cette distance familière que je vous
évoquais en prenant ces dernières références:
- celle à mon interlocuteur qui m'apporte
in extremis mon papier
- et celle à moi-même qui dois ici me risquer
à mon discours sur l'angoisse.
Nous allons essayer, cette angoisse, de la prendre sous le bras.
Ça ne sera pas plus indiscret pour cela.
Ça nous laissera vraiment à la distance opaque, croyez-moi,
qui nous sépare de ceux qui nous sont les plus proches.
Alors, entre ce « souci » et ce « sérieux », cette attente,
est-ce que vous allez croire que c'est ainsi que j'ai voulu
la cerner, la coincer ? Eh bien, détrompez-vous.
Commenter  J’apprécie          00









{* *}