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Critiques de Jacques Poujol (3)
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La colère et le pardon : Un chemin de libération

Dans ce livre pratique qui touche à la psychologie, il est question de pardon interpersonnel, en lien avec la notion de pardon dans la foi chrétienne. Ce livre s'adresse aux personnes qui ont été blessées et à celles qui les accompagnent, ainsi qu'aux personnes qui exercent dans le domaine de la relation d'aide. Dès l'ouverture, J. Poujol précise qu'il s'inscrit en faux contre une conception erronée du pardon qui voudrait qu'il faudrait « pardonner à tous et sans condition aucune » (page 10).



L'auteur fait d'abord un détour par les écrits bibliques pour éclairer la notion de pardon. Dans la Bible, le pardon est une notion de type juridique, avec un offenseur (la personne qui a fait du mal) qui a une dette à l'égard de l'offensé. Le pardon n'est accordé par l'offensé que lorsque l'offenseur fait acte de repentance. Sans repentance, le pardon est impossible.



J. Poujol fait la liste de quelques fausses croyances relatives au pardon. Ces croyances retiennent les personnes offensées dans des prisons intérieures. En particulier, pour l'auteur, pardonner ne veut pas dire que l'offensé devrait « redevenir comme avant » face à l'offenseur. L'auteur rappelle également la différence entre l'erreur de comportement (sans trop de gravité) et l'offense. A cette distinction fait écho une autre distinction, entre excuses (la personne qui a fait une erreur de comportement est censée présenter ses excuses) et pardon (l'offenseur est censé demander pardon à l'offensé).



Pardonner est difficile pour l'offensé, et demander pardon est difficile pour l'offenseur. En effet, l'offense et le pardon remettent en question la croyance (de l'offensé et de l'offenseur) en leur toute puissance (leur « moi idéal »). Pour l'offensé, l'offense a eu un impact sur son moi idéal ; elle lui rappelle sa fragilité, sa vulnérabilité, et sa crédulité. L'offensé se dit qu'il n'a pas été capable de se protéger. Pour l'offenseur, reconnaître sa faute remet en question ce qu'il pensait pouvoir être dans la vie ; cela questionne sa construction intérieure. Pour l'offenseur, minimiser, banaliser, ou excuser son rôle lui permet de sauvegarder son sentiment de toute puissance. Le pardon renvoie à l'acceptation de la fragilité et de la finitude.



J. Poujol distingue trois types d'offenseurs :



(1) L'offenseur bienveillant, dont l'offense n'est pas intentionnelle, qui sera capable de dire qu'il est responsable de l'offense.



(2) L'offenseur égocentrique, qui « est plus orienté vers la compensation de ses propres blessures narcissiques que vers l'écoute et la rencontre de l'autre » (page 26) et qui traite les autres comme des objets.



(3) L'offenseur malveillant, qui considère également les autres comme des objets, et qui emploie différent moyens (physiques, sexuels, psychologiques…). Lorsque l'offensé lui expose sa souffrance, ce type d'offenseurs ment, se réfugie dans le déni, et inverse la responsabilité entre la victime et lui-même. Dans la Bible, l'offenseur malveillant est le « méchant ».



Concernant la repentance et le pardon, l'auteur présente trois grands cas de figures, qui correspondent aux trois types d'offenseurs.



(1) Le cas simple : conscient de l'offense, l'offenseur (bienveillant) se repent, et l'offensé accepte la demande de pardon.



(2) Lorsque l'offenseur (égocentrique) n'est pas conscient de sa faute, l'offensé peut lui exposer les faits, son ressenti, et les conséquences sur sa vie. L'offenseur demande ensuite pardon. J. Poujol souligne qu'il est possible que la personne blessée ait de la peine à pardonner.



(3) Lorsque l'offenseur est malveillant, il refuse de reconnaître sa responsabilité, ne se repent pas, nie le problème, et se fait passer pour la victime. J. Poujol souligne alors que l'offensé ne doit pas accorder son pardon : « ce serait une grave erreur de croire qu'il est bénéfique d'accorder son pardon à quelqu'un qui ne se repent pas » (page 33) ou encore « on ne peut jamais passer directement de « je suis offensé » à « je pardonne » » (page 36) (il manque l'étape de la repentance de l'offenseur). L'offensé ressent de la colère, qui est la réaction face à la situation d'injustice.



Dans ce cas (3), J. Poujol suggère à l'offensé d'emprunter un autre chemin que celui du pardon, pour se libérer de l'offense. Pour l'offensé, l'offense représente un « dossier » qui l'empoisonne et qu'il faut classer en quelques sorte. Pour J. Poujol, l'offensé, en « se disant », peut confier ce dossier à Dieu [mon point de vue personnel : il me semble que dans certains cas graves il peut aussi confier le dossier à l'institution judiciaire en portant plainte]. Le fait de se dire (de « lâcher prise ») rend l'offensé libre. J. Poujol mentionne que se détacher du dossier ne signifie en aucun cas accorder son pardon. Enfin, « l'énergie que libère le souvenir de l'offense devra maintenant trouver une expression nouvelle dans un militantisme concret qui oeuvre pour la justice » (page 35).



En se fondant sur une mauvaise interprétation de textes bibliques, des groupes pseudo-thérapeutiques peuvent parfois mettre en avant l'idée que la victime devrait essayer de pardonner alors qu'il n'y a pas eu de repentance de l'offenseur. Ces groupes affirment que le pardon est nécessaire à la guérison. Pour J. Poujol, cette approche fait de la victime la responsable du problème, et par là-même lui fait violence. Pour ces raisons, J. Poujol conclut que cette approche est profondément nocive. Il rappelle qu'aussi bien St Augustin que plusieurs autres théologiens affirment qu'il n'est pas possible d'accorder de pardon à celui qui ne s'est pas repenti.



L'auteur souligne les bienfaits de la colère, qui pousse l'offensé à dire sa blessure. La colère peut être dirigée contre différentes personnes, y compris les parents (alors que l'on a traditionnellement interdit aux enfants de faire un droit d'inventaire de ce qu'ils ont reçu de leurs parents, l'auteur affirme que faire cet inventaire est une nécessité). J. Poujol affirme qu'exprimer sa colère, plus précisément « bien dire sa colère » en suivant plusieurs étapes (voir page 52), permet de se libérer.



Avant de conclure, l'auteur reprend des versets bibliques souvent mal compris selon lui, pour en donner une interprétation appropriée. C'est l'occasion pour l'auteur d'ajouter quelques idées supplémentaires. Par exemple, donner le pardon sans repentance est une façon de cautionner le mal. De plus, le pardon sans repentance relève aussi d'un manque de compassion, puisqu'il ne permet pas à l'offenseur de prendre conscience de ses actes.



En conclusion, J. Poujol écrit que « le véritable pardon n'est ni inconditionnel ni unilatéral. C'est une invitation, un don que l'on ne peut offrir qu'à celui qui en fait la demande » (page 61). L'auteur termine son ouvrage sur deux idées. La première prend la forme d'un conseil : les personnes qui ont subi des sévices devraient chercher un bon psychothérapeute pour les aider. La seconde idée est une exhortation à « choisir la vie ».





Pour ma part, je trouve que c'est un petit livre intéressant, que l'on soit chrétien et croyant ou pas, car il invite à réfléchir à différentes conceptions du pardon. Pour se faire une idée plus précise sur le propos de l'auteur, il sera bien entendu nécessaire de lire le livre.


Lien : https://benedicteapouey.blog..
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L'accompagnement psychologique et spirituel..

Un très bon livre, foisonnant, pour réviser la théorie et quelques éléments pratiques de l'accompagnement (pastoral dans mon cas).

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