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Citation de enkidu_


Quand Jacques et Jude appellent Jésus « Seigneur », il s’agit d’un terme de déférence envers le « Maître » – kurios, en grec –, celui qui a donné sa vie pour la cause du Royaume de Dieu. Mais l’un des glissements sémantiques fondamentaux opérés par Paul est d’avoir mêlé les références au « Seigneur » Jésus à celles concernant le « Seigneur Dieu » de la tradition biblique, traçant ainsi un trait d’égalité entre le Christ… et Yahvé. Par exemple, lorsque Paul cite Isaïe rapportant la parole divine – « Tournez-vous vers moi, et vous serez sauvés, vous tous qui êtes aux extrémités de la terre ! Car je suis Dieu, et il n’y en a point d’autre. Je le jure par moi-même, la vérité sort de ma bouche et ma parole ne sera point révoquée : tout genou fléchira devant moi, toute langue jurera par moi » (Isäie, 45, 22-23) –, il remplace tout simplement Yahvé par Jésus : « Afin qu’au nom de Jésus tout genou fléchisse dans les cieux, sur la terre et sous la terre, et que toute langue confesse que Jésus-Christ est Seigneur » (Philippiens, 2, 10-11).

Nous avons là une modification d’une importance capitale, qui finira par devenir une pratique commune parmi les chrétiens orthodoxes : Jésus de Nazareth, simple mortel, égal du « Seigneur Dieu » d’Israël ! Il est « Dieu selon la chair », dira-t-on, et Marie est « la sainte mère de Dieu ». Comme les chrétiens affirmeront cependant qu’ils demeurent monothéistes, c’est-à-dire qu’ils reconnaissent toujours la principale profession de foi juive, le Shema – « Ecoute, Israël, le Seigneur, notre Dieu, le Seigneur est Un » –, la conclusion sera inévitable : puisque Jésus est divin, et puisqu’il n’y a qu’un seul Dieu, alors Jésus ne peut qu’être l’incarnation du Seigneur Dieu d’Israël. Pour résumer : Dieu est devenu un homme…
(…)
Cette déification de Jésus, inconcevable pour l’écrasante majorité des juifs, l’était tout autant pour les premiers disciples et sympathisants du mouvement : s’ils révéraient le « Maître » et son enseignement messianique, celui-ci se plaçait sous le principe du Shema, l’acte de foi israélite, le « principal commandement » selon ses propres dires (Marc, 12, 29). Le même évangéliste a conservé une anecdote qui illustre bien cette conviction inébranlable : « Comme Jésus se mettait en chemin, un homme accourut, et se jetant à genoux devant lui : Bon maître, lui demanda-t-il, que dois-je faire pour hériter la vie éternelle ? Jésus lui dit : Pourquoi m’appelles-tu bon ? Il n’y a de bon que Dieu seul. » (Marc, 10, 18). (pp. 285-286)
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