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Citation de Partemps


3 -

Vendredi 14 janvier 2011
Jardin botanique d’Oslo (Botanisk Hage) - Norvège


Je note, dans le carnet 32, page 47

« Car si Orphée ne sait pas où il va, il doit connaître qui l’y pousse, et ce qui l’inspire. »
Pierre Schaeffer


Nous existons dans une matière entière
une complexité palpable
reliant tous les êtres, les objets alentours (et ce, jusqu’aux confins)
de la même substance —

— et voici que d'un point focal (le haut-parleur)
d'une membrane technique électrique qui claque dans l’air de notre atmosphère
se délivre un espace nouveau - comme en une catastrophe -
bousculant les règles habituelles de notre perception auditive

Y aurait-il d'autres mondes enchâssés dans notre monde ?

Et cette fêlure qui paraît si soudainement
semblant nous dégager une passe vers ces régions nouvelles
ne met-elle pas à jour, en un retour de lucidité, cet état de fait qui serait notre appartenance intrinsèque à une telle substance ?

Où entrons nous par cette singulière porte haut parlante
qui bâille
entre souffle
et
gouffre ?

À quoi le haut-parleur, lorsqu’il projette dans l’espace des sons enregistrés et composés
est-il capable de nous révéler ?



Second allumage du feu (qui s’éteindra de lui-même pendant la lecture…)



À l’écoute de certaines œuvres de musique concrète — je pense tout particulièrement à :

La Tentation de saint Antoine de Michel Chion
aux Espaces inhabitables de François Bayle
à Crossing the river de Bernarhd Günter
au Livre des morts Égyptien de Pierre Henry
à La Symphonie pour un homme seul de Pierre Schaeffer et Pierre Henry
à PSI 847 de Éliane Radigue
au Roaratorio de John Cage
à Gaku-no-Michi de Jean-Claude Eloy
à 12 Haïkus de Bernard Fort
à Tabou de Michèle Bokanowski
à Stop ! l’horizon de Christian Zanési
à Apocalypse de Tod Dockstader
à La création du monde de Bernard Parmegiani
à Et si toute entière maintenant… de Luc Ferrari
à Vier Vorspiele de Ralf Wehowsky
à Œuvre désintégrale de François Dufresne
à Messe aux oiseaux de Jacques Lejeune
à Automatic writing de Robert Ashley
à Esprit de sel de Hughes germain
à Il divano dell’orecchio de Walter Marchetti
à Into India de Hildegard Westerkamp
à Hymnen de Karlheinz Stockhausen
à Tract de Yann Mimaroglu
à L'illusion acoustique de Marc Favre
à Week end de Walter Ruttmann
à Red Bird de Trevor Wishart
à Touch three de Phill Niblock
à L'image éconduite de Philippe Mion
à Mantra de Jean-François Laporte
à La mécanique des ruptures de Gilles Gobeil
à Break before make de Gert-Jan Prins
à Flamme de Hervé Castellani
à Paris de Xavier Charles et Jean Pallandre
à La légende d'Eer de Iannis Xenakis
à Image Mirage de Xavier Garcia
à 55 pas… de Michael Gendreau
à Zone sensible de Éric Lacasa
à Un homme à la mer de Nicolas Losson
à 3 scénographies de présences animales de Yannick Dauby
à A blue book de Olivier Capparos
à Des sphères de Jean-Baptiste Favory
à Jamaica Heinekens in Brooklyn de Charlemagne Palestine
à Sous le regard d’un soleil noir de Francis Dhomont
à I am sitting in a room de Alvin Lucier
aux Audio poèmes de Henri Chopin
à Bocalises de Denis Dufour
à Disengage de Jim O'Rourke
à Wind (Patagonia) de Francisco Lopez
à Le luxe de la réflexion de Laurent Grappe
à L'ivresse de la vitesse de Paul Dolden
à Luminétudes de Ivo Malec
à La journée de Dominique Petitgand
à Desert tracks de Michel Redolfi
à The last LP/cd de Michael Snow
à Osorezan de Éric Cordier
aux Field recordings de Toshiya Tsunoda
à Nara de Bertrand Dubedout
à Earflash de Voice Crack
à Kitnabudja Town de Roger de la Frayssenet
à Radio memories de Christian Calon et Chantal Dumas
à Gloire à… de Jérôme Noetinger
à Signal sur bruit de Guy Rebeil
à Corazon road de Kristoff K.Roll
à Le triangle d'incertitude de Cécile Le Prado
à Cuisine sonore de Philippe Blanchard/Lieutenant Caramel
à Kaon de Artificial Memory Trace/Slavek Kwi
à Music from the magnetosphere de Stephen Mac Greevy
à 23 panoramas de fréquences de Emmanuel Holterbach
à Chant de glace de Boris Jollivet
à On the Verge of Redundance de Leticia Castaneda
à Shadow of shadow de Brandon Labelle
aux Field recordings de Dave Phillips
aux Images of the dream and the death de Akos Rozmann
à Outside the circle of fire de Chris Watson
à Walk through resonant landscape de Frances White…


À l’écoute de certaines œuvres de musique concrète, donc — la liste reste ouverte…
le sonore (composé et transformé par les diverses manipulations du support via les mains artisanes du compositeur, comme en un creuset) nous est à chaque fois rendu
- tel est l’un des enjeux de cet art de la reproduction des sons enregistrés -
en une nature nouvelle

En tant qu’auditeur ne sommes-nous pas au plus proche, désormais (et selon notre disponibilité)
de ceux ou de celles qui, eux-mêmes
sont arrivés, par leur art, jusqu'au seuil d’une révélation
et ce, quand bien même leurs compositions (ci-dessus nommées)
n’œuvrent, en aucun cas - ceci n’est pas incompatible -
dans les mêmes territoires stylistiques ou poétiques ?

Par révélation je n’entends pas, ici, me lover sous une mystique
agrippée à je ne sais quelle religiosité ; je parle cependant d’une liaison possible
par un art révélé (une discipline à l’aube de sa maturité) avec ce qui, du monde
lors d’une alliance sensible et évidente
représente, selon moi, l’essentiel
à savoir le contact ressenti
face à face
avec un équilibre premier (qui lui ne s’explique pas)
mais qui, lorsqu’il est mis à jour, devient un formidable générateur de forces
de vigueur
de sens pour notre existence
et sourd, magnifiquement, à l’écoute de toutes ces œuvres
en un silence - une tranquillité - proche des profondeurs

Par l’intermédiaire de ces compositions concrètes, le souffle et son mystère (j’aurais envie de dire : la beauté) devient presque palpable —

— la beauté se manifeste
tout en étant ceinte de l’étrangeté et de la gravité nécessaire mise en œuvre
(voici le chantier véritable)
comme une gigantesque et prodigieuse question frayant librement dans l’espace intérieur de chaque composition et qu’il nous est donné
selon la relation que nous entretenons avec elle
d’apprécier sensiblement, éventuellement de déchiffrer
dans tous les cas de côtoyer
et en laquelle nous avons confiance

Et cette question (une invocation ?) ne signe-t-elle pas, en définitive
un champ artistique propre qui serait celui d’une discipline musicale permise par la fixation des sons de l’air ?
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