Je note, dans le carnet 32, page 51
Le souffle, c'est le mouvement ; mais ce mouvement, nous l’avons vu
n'est pas uniquement celui rapporté, par le biais de l'image, d'une vie antérieure
dont nous ne posséderions plus que la trace
ni cette gesticulation cinétique qui, hélas, parcourt l’échine de nombre de réalisations anecdotiques
Le mouvement - le grand mouvement - qui m’intéresse ici
est celui de l’évidence révélée en un être nouveau (une entité nouvelle)
qui n'existe pas en dehors du champ rayonnant de ce souffle
intensément actif
Le souffle est ainsi la signature de cette relation
entre nous, auditeurs
et l’effet que l’image nous fait 2 —
Le souffle, en un sens, chevauche l’image acoustique
voire se confond avec elle — le souffle est le germe de l’image acoustique elle-même lorsqu’elle se saisit et nous saisit au plus haut de son épanouissement
Le souffle advient au sein d’un archipel des relations
au croisement d’un acte d’écriture juste et mesuré
et d’une poétique
jusqu’à dépasser, parfois, les intentions du compositeur : à lui de savoir trouver, désormais
face à cette présence souveraine
la distance nécessaire ; à lui de se situer et d’agir, dans son écriture, où il faut et quand il faut
et de laisser parler, à sa place, un telle exigence venue du dehors
qui deviendra, tout en même temps, le ferment
si ce n’est le principe même
de sa composition
Ce mouvement
en tant que phénomène enfin défait de l’unique plasticité de l’œuvre
parle de lui-même et s'adresse directement à tout notre être
par le biais de notre audition
En nous accordant, auditeurs
à ce mouvement
nous obtenons plus de vie
Ce grand mouvement (un véhicule ?) exprime le dehors voire le représente :
il nous ouvre
à la nécessité de son existence
L’image est en nous ; l’image est ardente, l'image est vivante — et nous la respirons. 3