Avec la rentrée de nos chères têtes blondes a eu lieu une autre rentrée, bien plus jubilatoire et peut-être un brin plus sauvage : la rentrée littéraire. À cette occasion, Babelio a proposé un Masse Critique très riche. Sincèrement, je n’avais pas d’envie particulière en terme de lecture, aussi je me suis laissé portée par mon instinct en demandant qu’on m’envoie Sexagénaire d’un auteur que je n’avais jamais lu, Jean-Moïse Braitberg.
Au premier abord, je ne partageais guère de points communs avec le héros de Sexagénaire. À la retraire, replié dans la campagne, Roland passe son temps entre le jardinage et les sites de rencontres. Parce que le bougre veut chopper, désirant profiter de ses dernières années en forme pour jouir de la vie. Sincèrement ? J’avais un peu peur avant de me plonger dans l’ouvrage de monsieur Braitberg pour tomber sur une version masculine et poivre-et-sel de chick-lit légère. Si tu es un habitué de cet espace, ami-lecteur, tu t’es peut-être aperçu que le genre en question ne m’intéresse pas, malgré mon goût pour toute forme de littérature dite sentimentale. Du coup, une fois reçu le bouquin, j’avoue que je me suis un tantinet interrogée sur la pertinence de mon choix. Mais qu’en est-il au terme de ma lecture ?
Truculent. Voilà le mot qui est resté dans mon esprit tout au long de Sexagénaire. Son personnage principal est truculent. Insupportable aussi, à se concentrer à ce point sur sa queue. Un héros attachant malgré son obsession pour le sexe, son égoïsme et son féminisme discutable. J’aurais pu facilement détester ce Roland aux relents amers et cyniques. Pourtant je l’ai adoré. Parce qu’il est drôle, provocateur dans sa franchise, vulnérable aussi, d’une manière bourrue. Dès les premières pages je me suis marrée, et c’est suffisamment rare lorsque je lis pour que cela me réjouisse fortement. Ainsi le héros explique qu’il n’aime plus trop traîner avec ses amis depuis qu’il est vieux. Et là de décrire combien ce sont des bobos :
Ils sont tous allergiques au gluten, voient des fachos partout et traitent de pervers narcissique toute personne qui les contrarie. Page 12
Au fil des pages, j’ai eu envie de noter nombres de citations tellement je les ai trouvées mordantes. Un exemple ? Voici :
On dira ce qu’on voudra mais l’Histoire devrait rendre hommage à Valery Giscard d’Estaing d’avoir libéré le cul en images. Son élection en 1974 fut un petit pas pour la droite libérale mais un grand pas pour la branlette ! Page 22
Ou encore lorsque Roland décide de s’inscrire à un site de rencontres et qu’il explique combien cela est profitable du point de vu du fric :
Je peux encore m’offrir ça. Si je n’arrive à en chopper qu’une, même si elle n’est pas terrible, ce sera bien plus économique que d’aller aux putes. Page 30
La plume de monsieur Braitberg est la grande qualité de son ouvrage, une plume très talentueuse quand il s’agit de dépeindre un personnage, de nous faire profiter de sa vision du monde. Le narrateur est sans pitié dans ses monologues, intérieurs ou non. Enfin, l’auteur parvient à rendre son héros à la fois magnifique et pitoyable. Bref, de ce point de vu, un vrai coup de cœur !
En dépit de l’enthousiasme que je viens de partager, Sexagénaire ne décrochera pas le prix de l’excellence. Car l’histoire en elle-même, et particulièrement le dénouement, m’ont semblé de simples prétextes pour mettre en scène le personnage de Roland. Puis le coup de l’arroseur arrosé – je ne dévoile rien puisque la formule « tel est pris qui croyait prendre » figure sur la quatrième de couverture – est franchement trop facile. Surtout emmené avec maladresse.
Malgré tout, j’ai énormément apprécié ma lecture car il est rare, trop rare, qu’un livre parvienne à me faire rire. Rien que pour cela, et si tu es sensible au genre d’humour entrevu dans les quelques citations figurant dans ma bafouille, je ne peux que te recommander le roman de Jean-Moïse Braitberg.
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