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Citation de Maatneferkara


Loches (Indre-et-Loire), 2 avril 2005. Dans la collégiale Saint-Ours, une cérémonie religieuse marque la fin d'un étrange parcours pour les restes d'une femme disparue le 9 février 1450. Après bien des errements, le tombeau, surmonté d'un gisant magnifique, retrouve presque sa place, pas tout à fait au même endroit que lors du premier service funèbre. Celle qu'on avait surnommée la «Dame de Beauté» ne repose plus dans le choeur de l'église paroissiale, mais dans la nef de gauche. Sa sépulture, profanée pendant la Révolution, avait déjà été déplacée sous le règne de Louis XVI, puis sous l'Empire. Cinq cent cinquante-cinq ans après sa mort, cette femme suscite toujours la curiosité, voire la fascination. L'exceptionnelle finesse de ses traits, son corps long et mince, tels que nous les rendent ses portraits dus au pinceau des plus grands peintres de cette période pré-Renaissance, de François Clouet à Jean Fouquet, ne cessent de nous émerveiller. Fouquet l'a même représentée en Vierge à l'Enfant dans un admirable tableau sans doute posthume, osant, comme l'avait fait Clouet auparavant, la montrer le sein gauche dénudé. La Vierge n'est autre qu'Agnès Sorel ! «Regard baissé, front haut, sourcils soigneusement épilés, petit nez pointu, lèvres rouges et fines, petit menton, son visage est gracieux et fragile, d'une grande finesse. La taille est très fine, le ventre plat, et le haut de la robe, délacé, laisse voir un sein splendide, ferme, provocant, qui est en fait le centre du tableau, attirant tous les regards.» Une oeuvre qui mélange le sacré et le profane d'une manière audacieuse, troublante et révélatrice, car le véritable titre de gloire de celle qui a servi de modèle à cette Vierge était d'être la maîtresse reconnue et follement aimée du roi Charles VII ! Plus que cela, puisque Agnès a été, sans aucun doute, la première femme installée, officiellement, dans le statut de favorite d'un souverain, qui avait d'abord une épouse. Un roi, une reine, une favorite : le début d'une tradition française !

Charles VII n'a pas beaucoup de chance dans notre mémoire collective. De lui, dont le règne fut très long pour son temps (près de quarante ans), on ne retient trop souvent que cette ineffaçable dénomination étriquée de «petit roi de Bourges» et les trois femmes qui ont pesé sur sa vie : sa mère, la redoutable Isabeau de Bavière soupçonnée d'adultère ; Jeanne d'Arc, qui fait de lui un roi de France légitime, enfin sacré à Reims ; et Agnès Sorel, dont on dit, exagérément, qu'elle l'a poussé à reprendre la guerre pour «bouter les Anglais hors de France» et clore victorieusement la guerre de Cent Ans. Son fils et successeur, le rusé Louis XI, lui vole injustement la vedette en tant que premier roi de la France moderne par son esprit centralisateur et unificateur. Charles VII avait déjà largement entamé cette transformation du royaume, mais on omet souvent de l'en créditer. Or, pour lui, rien ne fut simple ni définitivement acquis.
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