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Citation de AmericaLatinaLover


La vie n'est pas
Une coupe enchantée, qui se change soudain
En fiel pour les malheureux, et en pétillant
Tokay pour l'homme heureux. La vie est grave,-
Fragment de l'Univers, formule reliée
A l'immense formule, esclave ligotée
A un chariot d'or, qui aux propres regards
De tous ceux qu'il emporte en sa course rapide
Se cache en une gloire de poussière d'or,- esclave
Par d'invisible et lourdes chaînes
A l'inlassable éternité attachée !

Notre terre est un cirque, comme celui de Rome ;
Près de chaque berceau c'est une panoplie
Invisible qui attend l'homme, et où flamboient
Comme un poignard cruel frappant qui le brandit,
Les vices, et comme des écus de pureté
Les vertus : la vie est cette vaste arène,
Et les hommes sont les esclaves gladiateurs,-
Mais le peuple et le roi, en silence regardent
Des gradins élevés, dans l'ombre solitaire.
Mais ils regardent ! Et celui qui dans le combat
A baissé son écu, ou bien l'a écarté,
Ou lâche a supplié, ou a offert son cœur
Faible et soumis à l'impitoyable dague
De l'adversaire, les farouches vestales
Assises sur le trône d'implacable pierre
Le condamnent à mort, pollice verso,
Et la dague enfoncée jusqu'à la garde vile,
Sur l'arène cloue le lâche gladiateur.

Relève, ô peuple, ton écu, car cette vie
Est grave, et toute action est une lourde faute
Que l'on porte plus tard tel un anneau d'esclave
Fermé autour du cou, ou grande récompense
Qui permet d'échapper au funeste destin !

Voyez-vous les esclave ? Comme des corps sans vie
En grappes réunis, derrière votre dos
Ils seront là vie après vie, et vous du front.

Livide et angoissée, cette sinistre charge
En vain vous halerez, jusqu'à ce que le vent
De votre châtiment barbare apitoyé,
Des atomes derniers ne fasse que poussière !
Ah quelle atroce vision ! ah quelle terrible
Procession de coupables ! Comme en une noire
Plaine je les contemple, effrayants, haletants,
Arbres privés de fruits, lianes séchées
Et pitoyables, en une funeste contrée
Où le soleil est sans clarté, l'arbre sans ombre !
Ils rament en silence, comme sur un vaste
Océan privé d'eau, tandis que sur le front
Ceinte est la corde comme le joug du bœuf,
Et à l'arrière enfin, leurs maigres corps zébrés
De cruels coups de fouet, la foule des captifs !

Voyez-vous ces carrosses, ces blancs linges fins
Amènes et légers, ce superbe coursier
La crinière tressée, les rênes magnifiques,
Cette selle de riches parures d'argent
Garnie, et le minuscule escarpin
Prison, en même temps, du pied comme des cœurs ?
Or voyez donc qu'ici les autres vous méprisent
Comme une race vile, sans courage et sans vie !
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