INSOLITE I
LE ROI ET CAETERA
Aimez le roi ET CAETERA
Qui ne fut blessé qu’une fois
Mais que nulle eau ne peut guérir,
Ni eau d’étang, ni de fontaine,
Ni celle d’Alpes, ni la mer ;
Ni confiture de sureau,
Ni celle de cynorrhodon
Faite avec des baies d’églantines.
Un soir, sentant qu’il va mourir ;
Une fois réglé l’héritage,
Il erre aux berges sans désir.
Les mouches suivent avec plaisir.
JOUR PERDU
Quelque part un grand jour perdu.
Il fait beau, moins beau pour le pauvre
triste oriflamme du soleil.
Il fait clair, clair sur la rivière
mais toujours de glace et de neige.
L’été signe sa solitude avec son feu.
En moi l’esprit consent un scintillement d’astre.
Je reste créature à l’aube du secret.
VŒUX DE DÉLIRE
Être nommé vainqueur d’oubli,
Recourir à la mer, aux rêves ;
T’avoir dédié le pays gris
Avec ses grappes d’incendie
Entre buissons d’hiver sans ombre ;
Devenir le dernier enfant
Accoudé, grimpé aux barrières,
Regardé, flairé par les bêtes
Près des abattoirs du couchant ;
Quand la saison se désagrège,
Te border de hauts cieux les lèvres
Où odeur et douceur se puisent ;
En délire aborder l’automne
Jusqu’où les statues s’enlisent
De l’hiver qui voudrait fleurir ;
Joindre ta natte à l’anémone,
Et ta tendresse à ton couteau,
Et ce miel et ce fer,
Et nos deux solitudes.
CENDRES
Que de cendres dans la chaudière de la vie
quand au petit matin elle s’est refroidie !
Et plus de petit bois, plus d’anthracite,
plus à brûler d’objets hétéroclites.
Alors on tisonne comme l’on meurt,
à petits coups lassés du cœur,
jusqu’à la saison d’autres roses.
LE COQ BLANC
le coq blanc de l’hiver
dans la neige se perd.
Il lustre son plumage
Aux ruisseaux des nuages.
Quand les astres s’éteignent
Son cocorico saigne
Dans la boue des jardins.
INSTANTS DE PLUS
Une plume de geai
pour signet des grands livres
tout oiseau est esprit.
p.9
DEUIL VERTICAL
Elle est morte la jeune fille
Qui tomba longtemps du ciel d’août.
On a laissé la porte ouverte
Sur le regret caniculaire.
Le malheur a les yeux à terre ;
Le malheur compte les cailloux.
Un deuil vertical de phosphore
Affaisse les torses d’albâtre.
La maison est un labyrinthe
Où sanglotent les rais, les ombres,
Où la vie, devenue boiteuse,
Redescend le chêne, le plâtre.
INSTANTS DE PLUS
Regret impérissable :
n’avoir su imposer à temps
la séduction de ses dieux.
p.9
INSTANTS DE PLUS
Je nous aimais marcheurs du soir
qui avancions parmi les lampes
dans le repos ou le tumulte de nos cœurs.
p.13
Bab 03032022 00h00
INSTANTS DE PLUS
C’est décembre
le vent chante les arbres vieux
l’effraie qui rejoint le silence.
p.8