Mon avis :
Les plus perspicaces d’entre vous auront immédiatement relevé, dans le cours résumé qui précède (présentation du roman sur un site de vente très connu), quelques petits détails qui accrochent l’œil comme une feuille de salade au milieu d’un sourire…
Je ne prends pas cette image au hasard, elle correspond bien à l’effet que me laisse ce court roman : sans être un chef-d’œuvre de la littérature, on se laisse embarquer avec plaisir, mais la lecture est quelques fois légèrement perturbée par ces « bouts de salade » qui ont visiblement échappé à la relecture. Un mot mis pour un autre, par exemple, ou dont l’emploi n’est pas complètement adapté à la situation : il y a bien sûr cette « fonction ultime » vue plus haut, dont on se demande bien quel est son emploi ici, ou ce personnage qui « s’exprimait avec assurance et virilisme… » Il y a aussi quelques phrases un peu maladroites qui auraient mérité d’être retravaillées. Et la faute de synthèse qui se joue parfois à une virgule près !
Mais soyons indulgent, il s’agit d’un premier roman, et pour être juste, les erreurs ne sont pas nombreuses et l’ensemble tient la route.
La forme narrative est plutôt classique, mais bien construite. On n’est jamais perdu dans le récit et les quelques retours sur le passé sont bien intégrés. Les plus pointilleux regretteront le flou de quelques passages, comme ces surveillants d’internat dont la présence pourtant évidente n’est révélée que tardivement, ou cette absence totale de parents pour David qui semble vivre seul chez lui. D’une façon générale, les parents ne sont d’ailleurs qu’évoqués, mais c’est une tendance assez forte dans les histoires d’ados… période souvent synonyme de rejet de l’autorité en générale et parentale en particulier.
Le mot est lâché, nous sommes dans un roman « ado », et la description du bouillonnement et de l’intensité des sentiments dans cette période est plutôt réussie. Plus que l’action menée par les personnages, c’est d’ailleurs cela qui donne toute son épaisseur au récit. Au chaos des émeutes estudiantines se mêlent les cahots du chemin de l’apprentissage de la vie. Là où certains auteurs s’appesantissent dans les tourments d’un âge souvent difficile, Laurent Crevon, sans les occulter, ne sombre jamais dans le mélodrame. Si le sujet est grave, le ton reste assez léger. On peut être sérieux, quand on a dix-sept ans, mais on n’est jamais loin d’un éclat de rire et le style reflète bien cet état d’esprit.
Malgré quelques petites imperfections, Blocus total est une bonne surprise que l’actualité récente fait résonner encore plus fort. La fin aussi est raccord avec les mouvements sociaux de ces dernières semaines : ça se termine un peu en queue de poisson et on n’est pas certain qu’il y aura une suite… Pour les gilets jaunes, je ne me prononcerai pas, mais pour ce bouquin, s’il n’y en a pas, c’est frustrant ! Le final ne clôt pas l’histoire, alors j’espère que c’est bien le signe que l’auteur nous emmènera plus loin…
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