Marie se lève et lui prépare une tisane au thym pour calmer ses quintes. Qu’il est loin le temps où, après le dîner, ils s’installaient dans les fauteuils de la grande salle à manger, face au jardin fleuri de camélias, roses trémières, lupins, pivoines et hortensias. La longue pièce ne s’égaie plus de réunions familiales animées.
La vaisselle du dimanche ne quitte plus le haut buffet de bois sombre dans lequel elle repose. Ses portes scellées encadrées de colonnades torsadées évoquent une autre époque où la vie se fêtait avec insouciance autour d’une longue nappe de lin blanche brodée aux initiales des mariés.
Depuis cinq longues années, la vie s’est rétrécie ; tout comme l’espace occupé dans cette bâtisse. Encore heureux qu’elle ne soit pas réquisitionnée et qu’il n’y ait pas de soldat de la Wehrmacht sous leur toit. Logés chez l’habitant, il se dit que de nombreux Russes et Alsaciens y sont enrôlés de force, si jeunes parfois.