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Citation de Jo


Jo
29 janvier 2018
On ne peut pas toujours se noyer dans un verre d’alcool. J’avance sur le fil, celui du rasoir. J’aurai toujours peur du point de non-retour.

Pour ne pas hurler, j’écris jusqu’au tournis et j’accepte. De me dépeindre tantôt bonne, tantôt mauvaise, obscure, lâche, en proie à mon inhumanité, mais transcendant aussi tous les possibles que j’avais imaginés. Qui peut prétendre toujours dire la vérité ? Écrire c’est choisir et donc c’est tricher. J’accepte d’effacer des mots, des pages et des idées, et finalement j’accepte de tuer des milliers de personnages qui auraient pu exister à mes côtés. Selon les traits qu’on leur confère, selon ce qu’on choisit de pointer, nos héros naissent, changent ou bien meurent, jusqu’à ce qu’on décide de les figer. J’accepte que le roman prenne parfois des reflets de réalité, à la manière de la lumière que viennent colorer les feuilles de gélatine que l’on colle sur les néons ; échos d’encre à des scènes traversées un jour, une nuit, il était une fois. J’accepte d’épuiser mes pâles souvenirs jusqu’à ne plus les reconnaître pour laisser émerger la fiction.

L’écriture a cette faculté de déformer le réel jusqu’à ce que la création advienne, jusqu’au surgissement du fictif. À la relecture des années, les quelques anecdotes réminiscentes dont je me suis inspirée pour insuffler l’épaisseur de la chair à moi-même, poudreuse héroïne, sont connectées à des personnes, des époques, des teintes impossibles à retraduire ici fidèlement, sous peine de devoir dire tout le reste. Pour brosser le tableau de quelqu’un – et même le sien – il faut être exhaustif, depuis ses trajets sous la pluie jusqu’au rire de son frère. Il faudrait croquer chacune de ses secondes et la totalité de son environnement. Comme ce n’est pas possible, il faut choisir. Et créer autre chose. Et déformer quelquefois des souvenirs élimés pour qu’une authenticité éclose.

Jusqu’à parfois se demander, inquiète, si c’est de l’art ou du cochon.

Le temps d’apprendre à survivre. Le temps d’apprendre à écrire. Le temps d’apprendre à y croire.
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