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Le soir de novembre 1938 où l'Allemagne retomba dans la barbarie, le couple Heydrich était allé se coucher de bonne heure, dans sa maison de Berlin-Schlachtensee. Des coups frappés à la porte de la chambre éveillent soudain Lina, tandis que son époux continue de dormir. "Qui frappe ?" crie-t-elle. Le garde du corps répond : "C'est Schmidt. Le général doit appeler le bureau tout de suite!" Elle demande : "Qu'est-ce qui se passe ?", la réponse tombe : "Les synagogues brûlent!" Elle réveille son mari. Il se dépêche de revêtir son uniforme noir et part en trombe. Il ne revient que plusieurs heures après et paraît à sa femme "troublé et absent". Il déclare pour finir : "Ils ont tout cassé", saccagé et pillé les magasins... On ne pourra plus freiner les agressions contre les Juifs, à présent."
C'est ainsi qu'apparaît le rôle de Heydrich dans la "Nuit de cristal" du 9 au 10 novembre 1938 - au moins si l'on en croit Lina Heydrich et ses Mémoires (Leben mit einem Kriegsverbrecher, "La vie avec un criminel de guerre"). Mais rien de tout cela n'est vrai.
Ce soir-là en fait, comme tout ce que le nazisme comptait d'élites, Heydrich était à Munich, loin de Lina. ...