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Citation de enkidu_


Le peuple arabe est défini et identifié par la langue arabe. Encore faut-il qu’il prenne conscience de son identité. Pour Arsouzi, il s’agit de sentiment d’amour, de tendresse viscérale. Il utile le mot le plus sacré, celui qui désigne Dieu dans le Coran dès le premier verset, Rahmân, souvent traduit par Compatissant, qui évoque aussi en arabe l’idée d’entrailles, d’utérus. Sa sympathie viscérale va à la langue miraculeuse qu’est l’arabe, et donc aussi à tous ceux qui en sont amoureux. Arsouzi s’inspire de Plotin, de Jacob Boehme – qu’il apparente au philosophe mystique andalou du XIIIe siècle, Ibn Arabi –, des mystiques rhénans du XIVe siècle, des plotiniens allemands du XIXe siècle, de Bergson. Sa philosophie est « une philosophie du sentiment » et de l’intuition, de la connaissance affective et mystique.

Arsouzi appartient à la communauté alaouite. Pour les alaouites, tout est substantiellement divin. La grande connaissance secrète, ésotérique, transmise par tradition orale, repose sur un système cosmique d’émanation, selon lequel Dieu est inconnaissable mais partout présent. Seuls les initiés, les sages doués de réflexion, le savent et agissent en conséquence, par référence au « ciel des Idées », de l’Idéal, qui est Amour. L’altruisme et l’amour sont un instinct des hommes, mais pas une loi naturelle physique : les hommes ont la liberté d’agir vers l’idéal ou non. La masse, elle, préfère imiter et suivre : ce sont les « grossiers ». Arsouzi se réfère expressément à la tradition des « chiites ésotériques » des IXe-XIIIe siècles en Syrie notamment, ismaïlites, druzes, alaouites, à celle aussi des ordres mystiques musulmans sunnites (orthodoxes) qui distinguaient entre « ceux qui connaissent », « l’élite consciente », et les autres. A chaque génération, il existe des élites visionnaires et sentimentales, des héros et des prophètes qui sont eux-mêmes « la voie menant au Ciel », comme le furent Jésus et Mahomet, sémites tous les deux. Seules quelques personnes possèdent presque entièrement « la structure d’amour idéale », celle-ci représentant « la plus parfaite manifestation des Idées du Royaume des Âmes ». Ceux-là ont un amour social de type maternel, inépuisable et perspicace.

Cette idée d’un amour social de type mystique et initiatique, Arsouzi l’applique à la vie sociale et politique en reprenant le schéma de l’élite et de la masse. Une manière de sociologie et de science politique mystiques. Toute chose, dans son ordre, est soumise au principe d’attraction cosmique, à la fois jonction et séparation entre la Providence générale et la matière spatio-temporelle. Ainsi la société attire et écarte-t-elle à la fois les individus ; les individus éprouvent en même temps une attraction ardente et un désir de séparation ; en chaque personne, il y a à la fois altruisme idéal et égoïsme. L’ordre social est lui-même une « représentation de l’Idéal » suprême. (pp. 72-74)
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